AD HOC – 433/F

ARBITRAGE D’UN GRIEF

ENTRE :

CANADIEN PACIFIQUE EXPRESS LIMITÉE

(la « Compagnie »)

ET

SYNDICAT INTERNATIONAL DES TRANSPORTS – COMMUNICATION

(le « Syndicat »)

 

CONCERNANT : CONGÉDIEMENT de M. MARIO ROSARINI

 

ARBITRE:                                                         Me Michel G. Picher

REPRÉSENTAIENT LA COMPAGNIE :

R. M. Skelly                              – Procureur patronal

L. Béchamp                              – Procureure patronale

B. F. Weinert                             – Directeur, relations syndicales

C. McSween                              – Directeur régional, Québec et les Maritimes

REPRÉSENTAIENT LE SYNDICAT :

G. Marceau                               – Procureur patronal

K. Cahill                                    – Procureure patronale

J. J. Boyce                               – Président général

M. Gauthier                               – Vice-Président général

G. Lemire                                  – Président local

REPRÉSENTAIENT D’AUTRES PLAIGNANTS:

Me. R. Mercier—Procureur

Me. F. Poirier—Procureur

 

Audition de l’arbitrage à Montréal, le 27, 28, 29 et 30 mars 1990 et le 11 juin 1990. (Décision verbale rendue le 24 juillet 1990.)


SENTENCE ARBITRALE

Il s’agit d’un grief contre le congédiement d’un employé nouvellement embauché, sans ancienneté, pour conduite inacceptable. Le litige et la déclaration commune dans ce dossier sont comme suit:

LITIGE :

Après avoir été arrêté le 17 août 1989 par les agents de sécurité du Canadien Pacifique, monsieur Mario Rosarini a été suspendu de ses fonctions le 18 août 1989, et subséquemment congédié le 28 août 1989.

EXPOSÉ CONJOINT DU CAS :

Suite à une enquête tenue le 25 août 1989, le plaignant a été congédié pour avoir:

a)            Le 18 juillet 1989, ouvert un carton contenant des chandails de hockey;

b)            Le 18 juillet 1989, offert des stupéfiants à un compagnon d’entrepôt.

Le Syndicat conteste le congédiement pour les motifs suivants:

a)            Le plaignant a été discipliné six (6) jours avant l’enquête conduisant à son renvoi;

b)            Ladite enquête n’a pas été tenue dans les quatorze (14) jours des incidents reprochés contrairement aux articles 8.2 et 8.3 de la convention collective;

c)             Le plaignant n’a jamais commis les incidents qu’on lui reproche;

d)            L’enquêteur n’a pas agi de bonne foi;

e)             Le congédiement du plaignant est illégal, injuste et abusif compte tenu de toutes les circonstances.

Le Syndicat demande la réintégration de monsieur Rosarini sans perte d’ancienneté, de rémunération et avec tous les avantages qui lui sont conférés dans la convention collective.

La Société rejette les énoncés du Syndicat et a rejeté le grief à toutes les étapes de la procédure des griefs.

La preuve établit, à la satisfaction de l’Arbitre, que le 18 juillet 1989, lorsqu’il travaillait le plaignant a ouvert une boîte contenant des chandails de hockey et a demandé à un autre employé, qui à son insu était un policier enquêteur, s’il voulait en voler. À la lumière de la déclaration faite à la police du Canadien Pacifique le 18 août 1989, je rejette sa prétention qu’il n’a pas ouvert la boîte en question. En ce qui concerne cet incident je trouve plus vraisemblables et précis les faits relatés par le policier enquêteur Michael Witkowski.

En tant que nouvel employé, le plaignant est sujet au dispositions de l’article 6.2.4 de la convention collective, qui se lit ainsi:

6.2.4       Un nouvel employé n’est considéré comme permanent qu’après avoir accompli 65 jours de service cumulatif. Entre-temps, à moins de renvoi pour toute cause qui, de l’avis de la Compagnie, le rend indésirable à son service, l’employé accumule des droits d’ancienneté à compter de la date de son entrée en service à un poste régi par la présente convention.

Il me semble que dans les circonstances, à la lumière des faits rapportés par le constable Witkowski quant à l’incident des chandails de hockey, l’employeur pouvait raisonnablement en venir à la conclusion que M. Rosarini était indésirable à son service au sens de l’article susmentionné. À mon avis, cet article accorde à la Compagnie, en matière de congédiement, un fardeau moins lourd que le plein standard de juste cause qui s’applique dans le cas d’un employé permanent qui a de l’ancienneté.

De plus, je ne puis accueillir l’argument intriguant du procureur syndical à l’effet que la clause 6.2.4 est nulle parce qu’elle serait en dérogation de l’article 60(2) du Code Canadien du travail. Il soutient que cet article aurait l’effet de soustraire à l’Arbitre le pourvoir de substituer une réduction de peine disciplinaire dans une circonstance où une cause de discipline est établie et où la convention ne stipule aucune sanction particulière pour l’infraction en question.

Je ne vois pas ainsi l’effet de l’article 6.2.4 de la convention collective. Les dispositions de cet article n’interdisent aucunement à l’Arbitre de substituer une sanction disciplinaire moins sévère, même où il est établi qu’il y avait cause pour discipline et que l’employeur décidait que la cause en question rendait l’employé indésirable à son service. L’article est axé sur la question de l’acheminement vers la permanence et l’accumulation de l’ancienneté. Ces dispositions n’empêchent pas à un nouvel employé plein accès à l’arbitrage de son congédiement disciplinaire, tel que prévu au Code Canadien du travail. La convention traite séparément de la procédure des griefs à l’article 17. Il est, en plus, étrange que le syndicat plaide une telle position quand le procureur de l’employeur avoue ouvertement au nom de son client que l’article 6.2.4 ne fait qu’alléger le fardeau de la preuve, et ne peut éliminer ou réduire le pouvoir rémédial d’un arbitre.

Est-ce-qu’il y a lieu de réduire la sanction imposée en l’espèce? Je ne le crois pas. Comme nouvel employé, M. Rosarini savait qu’il travaillait en période d’essai, sans permanence. Si les faits étaient autres, par exemple s’il s’était mérité une discipline pour cause d’un seul retard de quelques minutes, et que l’employeur le prononçait indésirable à son service pour cette seule infraction, il y aurait lieu de justifier une intervention arbitrale. Mais lorsque, comme dans les faits, la conduite en question révèle un manque de respect pour la propriété des clients de l’entreprise et une attitude cavalière vis-à-vis le détournement de leurs biens, je dois conclure que le congédiement du plaignant est justifié.

Pour ces motifs le grief doit être rejeté.

FAIT à Toronto, ce 17ième jour de septembre 1990.

(signée) MICHEL G. PICHER

ARBITRE