BUREAU D'ARBITRAGE DES CHEMINS DE FER DU CANADA

CAUSE NO. 3416

entendu à Montréal, le mercredi, le 14 avril 2004

concernant

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

et

LES TRAVAILLEURS UNIS DES TRANSPORTS

REQUÊTE ÉMANANT D'UNE SEULE PARTIE

LITIGE:

Abolition des trains 122-123 et 136-137 entre Montréal et Halifax à compter du 10 décembre 2002 et 3 février 2003, respectivement.

EXPOSÉ DU CAS PAR LE SYNDICAT :

C'est la position du Syndicat que l'abolition des trains 122-123 et 136-137 pour les jumeler à d'autres trains est un changement qui, par son importance, justifiant un préavis devant être signifié au Syndicat conformément aux dispositions de l'article 79 du la Convention 4.16.

La Compagnie rejette le grief du Syndicat daté du 13 décembre 2002, ainsi que ré-édité les 10 mars et 30 septembre 2003.
 

POUR LE SYNDICAT :
(SGN.) R. LEBEL
PRÉSIDENT GÉNÉRAL

Représentaient la Compagnie :

D. Laurendeau
D. Van Cauwenberegh
J. Krawec

- Directeur, Ressources humaines, Montréal
- Directeur Principal - Ressources humaines, Toronto
- Directeur Principal - Relations de travail, Toronto

Et représentaient le Syndicat :

R. LeBel
J. Gagné
C. Belzile
J. P. Paquette
S. Pommett

- Président Général, Québec
- Vice-président général,
- Représentant local 4, Québec
- Représentant local 1139, Montréal
- Représentant local 0414, Montréal

 

SENTENCE ARBITRALE

Le Syndicat prétend que la Compagnie a enfreint les dispositions de l'article 79.2 de la convention collective en abolissant les trains 122-123 et 136-137 sans donner au Syndicat le préavis prévu à l'article et les protections qui en découlent.

Les faits ne sont pas contestés. L'abolition des trains en question, qui a entraîné une perte de plus d'une vingtaine de postes réguliers sur le territoire, a été rendu possible grâce à l'agrandissement des trains circulant sur le territoire. Il est convenu que les trains abolis ont été effectivement fusionnés à d'autres trains qui ont pris considérablement d'ampleur. Or, là où auparavant les trains étaient, par exemple, d'une longueur de 5 000 à 6 000 pieds, les trains fusionnés sont devenus de 10 000 à 11 000 pieds de longueur.

Il est également convenu que cet ajustement dans les opérations à été grandement facilité par l'allongement des voies d'évitement sur le territoire en question. La preuve démontre, par exemple, qu'à l'époque du changement les voies d'évitement à St Léonard, à Laurier, à St-Jean-Port-Joli et à Tarte ont presque doublé de longueur, passant d'environ 6 000 pieds à environ 11 000 pieds. Cela facilitait la circulation des trains de grande longueur, y compris les trains fusionnés après l'abolition des trains qui fait l'objet de ce grief.

L'article 79 de la convention collective se lit, en partie, comme suit :

79.1 Avant d'effectuer des suppressions d'arrête de relève, des changements, des fermetures de gares d'attaches (y compris celles découlant de la vente d'une ligne) ou des changements d'ordre technologique ayant des effets nettement défavorables sur les membres du personnel,

a) celle-ci informe le Syndicat, par un préavis d'au moins 180 jours, de tout changement du genre prévu et en fournit la description complète, avec des informations détailles sur les changements éventuels aux conditions de travail; et

b) la Compagnie négocie avec le Syndicat des mesures visant à réduire les plus possible les effets nettement défavorables des changements prévus touchant les membres du personnel, ces mesures ne devant pas inclure de modifications dans les échelles de salaires.

...

79.2 Dans tous les autres cas où des changements importants aux conditions de travail peuvent avoir des effets nettement défavorables sur les membres du personnel et que ces changements sont dus uniquement à l'initiative de la Compagnie,

a) celle-ci informe le Syndicat, par un préavis d'au moins 120 jours, de tout changement du genre prévu et en fournit la description complète, avec des informations détaillées sur les changements éventuels aux conditions de travail; et

b) la Compagnie négocie avec le Syndicat des mesures visant à réduire le plus possible les effets nettement défavorables des changements prévus touchant les membres du personnel, ces mesures ne devant pas inclure de modifications dans les échelles de salaire ni dans le niveau ou l'applicabilité des avantages prévus aux paragraphes 79.8 à 79.13 inclusivement.

...

79.6 Les changements proposé par la Compagnie pouvant faire l'objet de négociations ou d'arbitrage en vertu du présent article ne comprennent pas ceux qui résultent de l'application normale de la convention collective, ni les changements dus au fléchissement de l'activité commerciale, aux fluctuations du trafic ou à la redistribution du travail aux gares d'attache, ni les autres changements ordinairement liés à la nature du travail qu'accomplissent les membres du personnel.

La Compagnie prétend que l'exception prévue à l'article 79.6 s'applique en l'espèce. L'Arbitre doit accueillir cette position. Les choix que peut faire un chemin de fer concernant la fréquence et la longueur des trains, ainsi que des ajustements connexes concernant l'équipement ou le plan du territoire, tel que le positionnement et la grandeur des triages, le doublement des voies ou la longueur des voies d'évitement, est au cœur de la gestion au jour le jour de l'entreprise d'un chemin de fer. Ces choix concernent carrément les " ... changements ordinairement liés à la nature du travail qu'accomplissent les membres du personnel. " au sens de l'article 79.6 de la convention collective.

En ce qui nous concerne dans le présent dossier, il ne s'agit donc pas des changements de taille comme la fermeture d'une ligne ou de gares d'attache prévues à l'article 79.1 de la convention collective. Il ne s'agit non plus des " autre cas " de changement prévus à l'article 79.2 de la convention collective. Même si ces derniers ne sont pas définis d'une façon catégorique dans le libellé de l'article 79.2, il est clair qu'ils ne peuvent pas être des changements de la sorte reconnue comme étant des exceptions, tel qu'énumérés à l'article 79.6. Les ajustements d'opérations tels que ceux qui ont entraîné l'abolition des trains 122-123 et 136-137 n'enclenchent aucunement les obligations prévues à l'article 79.2 de la convention collective. Au contraire, à l'avis de l'Arbitre, un ajustement dans la longueur des trains représente un changement qui relève clairement de la gestion normale d'un chemin de fer, ce qui représente une circonstance prévue aux dispositions de l'article 79.6 de la convention collective.

Pour ces motifs le grief doit être rejeté.
 

Le 20 avril 2004 L'ARBITRE

(signée) MICHEL G. PICHER