BUREAU D'ARBITRAGE ET DE MÉDIATION DES CHEMINS DE FER DU CANADA

CAUSE NO. 3450

entendu à Montréal, le mercredi, 15 septembre 2004

concernant

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

et

LES TRAVAILLEURS UNIS DES TRANSPORTS

REQUÊTE ÉMANANT D'UNE SEULE PARTIE

LITIGE :

Renvoi de monsieur Claude Roberge, NIP 826051, contremaître de triage à Joffre, à compter du 31 mars 2004.

EXPOSÉ DU CAS PAR LE SYNDICAT:

Le 6 septembre 2002, monsieur Claude Roberge, la Compagnie et le Syndicat entérinent un contrat de réintégration en faveur de monsieur Roberge.

Le matin du 27 janvier 2004, lorsqu'au travail, madame Carmen Fréchette, infirmière pour la Compagnie en poste au triage de Joffre, demande à monsieur Roberge de se soumettre à un examen de routine, tel que prescrit dans le contrat dont il est fait état ci-avant. Monsieur Roberge informe madame Fréchette qu'il a, 10 à 12 jours auparavant, fumé un joint de marijuana et qu'il ne serait donc pas impossible que l'examen médical en décèle les traces.

Monsieur Roberge fut suspendu du service à la fin de son quart de travail jusqu'à son enquête qui eut lieu le 18 mars 2004 après quoi, il fut avisé qu'il était renvoyé pour bris de contrat à compter du 31 mars, la période du 27 janvier au 31 mars servant de suspension.

Le Syndicat en appelle de la décision car les circonstances entourant l'incident ne justifient pas un renvoi.

La Compagnie rejette l'appel.

POUR LE SYNDICAT :
(SGN.) R. LEBEL
LE PRÉSIDENT, COMITÉ GÉNÉRAL DE RAJUSTEMENT

Représentaient la Compagnie :

D. Laurendeau
D. Gagné
P. Dery

- Directeur - Relations de travail, Montréal
- Directeur - Relations de travail, Montréal
- Surintendant Adjoint

Et représentaient le Syndicat :

R. LeBel
C. Belzill
J. N. Paquette
R. Michaud
C. Roberge

- Président général, Ville de Québec
- Président local, Ville de Québec
- Président local, Ville de Québec
- Président, Comité législatif, Montréal
- Plaignant

 

SENTENCE ARBITRALE

Il est convenu que le plaignant a consommé de la marijuana, une fois, lors d'une fête familiale, contrairement au termes d'un contrat d'emploi qu'il a signé avec la compagnie le 6 septembre 2002.

La preuve démontre que le contrat résultait de la décision de M. Roberge de s'auto référer au programme d'aide aux employés à cause de ses problèmes d'alcool, en septembre 2002. Il est convenu qu'il a passé des tests de dépistage de drogue et d'alcool sans résultat positif à cinq occasions entre le 29 août 2002 et le 25 septembre 2003. Selon le plaignant, pendant la saison de Noël il a éprouvé de la difficulté face à l'anniversaire du décès de son épouse, et a consommé un joint pendant une soirée de rencontre familiale chez lui. Peu après, quant l'infirmière de l'employeur lui a demandé de subir un autre test de dépistage, il avoué sa consommation, ce qui a entraîné son congédiement.

Les décisions de ce bureau sont catégoriques pour affirmer que les arbitres accordent le plus grand respect aux contrats d'emploi, comme celui en l'espèce (BACFC 2746, 2632 et 2595). Par contre, la règle n'est pas inflexible, surtout dans la mesure où il s'agit d'un employé qui souffre d'une incapacité reconnue. À cet effet, l'arbitre s'est exprimé ainsi dans la cause BACFC 3269 :

Canadian jurisprudence does not, however, confirm that the violation of an agreement of the type which is the subject of this grievance must automatically result in an employee's termination. It is well established that each case must be reviewed on the merits of its own particular facts, and that in any event the application of any such agreement cannot be in violation of the duty of accommodation owed to an employee with a disability, in keeping with human rights codes such as the Canadian Human Rights Act. (Re Toronto Transit Commission and Amalgamated Transit Union, Local 113, (1998) 75 L.A.C. (4th) 180 (Davie); Re Regional Municipality of Ottawa-Carlton and Ottawa-Carlton Public Employees Union, Local 503 (2000) 89 L.A.C. (4th) 412 (Mitchnick); Re Camcar Textron Canada Ltd. and United Steelworkers of America, Local 3222 (2001) 99 L.A.C. (4th) 305 (Chapman))

(Vois aussi BACFC 2803.)

L'arbitre est d'avis qu'exceptionnellement ce dossier justifie que le plaignant soit accordé une dernière chance. M. Roberge est un employé de plus de trente ans de service, ayant été embauché le 16 décembre 1973. Il a été un bon employé, et son dossier n'indique aucun incident d'abus d'alcool ou d'autre substance au travail. Dans les incidents qui nous concernent, il a démontrer une franchise remarquable et il n'a pas tenté de tromper son employeur. D'ailleurs, la preuve établit que tout de suite après l'incident de sa consommation de drogue il s'est référer à un centre de soutien, Villa Ignatia, pour quelques jours. De plus, il n'y a jamais eu question de sa rechute dans la consommation de l'alcool, problème pour lequel il s'est auto-référer à Villa Ignatia avant l'établissement de son contrat d'emploi. Il y a donc lieu de conclure que le plaignant est très sérieux en ce qui concerne la reconnaissance et le contrôle de son problème face aux substances.

Somme toute, l'arbitre juge qu'il s'agit d'un seul événement non-conforme aux efforts et aux habitudes saines adoptés et suivis fidèlement par le plaignant ces dernières années. Il y a donc lieu, dans ces circonstances, de croire qu'il puisse réintégrer son emploi, toujours sous des conditions qui protègeront les intérêts de la compagnie.

Le grief est donc accueilli, en partie. L'arbitre ordonne que le plaignant soit réintégré dans ses fonctions, sans perte d'ancienneté et sans dédommagement pour sa perte de salaire et d'avantages sociaux. La période entre son congédiement et son retour au travail sera notée dans son dossier disciplinaire comme une suspension. De plus, comme condition de réintégration, M. Roberge doit accepter d'être sujet aux même conditions que celles de son contrat de travail du 6 septembre 20002, et cela pour une période additionnelle de deux ans à compter de la date de sa réintégration au travail. Il va sans dire qu'un manquement à ces obligations à l'avenir entraînerait les plus graves conséquences pour son emploi.
 

September 20, 2004 (signed) MICHEL G. PICHER
ARBITRATOR