BUREAU D’ARBITRAGE ET DE MÉDIATION
DES CHEMINS DE FER DU CANADA

 

CAUSE NO 4242

 

entendue à Montréal le 8 octobre 2013

 

opposant

 

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

 

et

 

LES MÉTALLURGISTES UNIS D’AMÉRIQUE – SECTION LOCALE 2004

 

LITIGE

            Contestation du non-paiement de l’assurance-maladie complémentaire de courte et de longue durée au nom de Madame Jennifer Bisson.

 

EXPOSÉ CONJOINT DU CAS

            Madame Jennifer Bisson a reçu des prestations de courte durée entre le 8 novembre 2011 et le 8 janvier 2012. Celle-ci s'est cependant vu refuser par la Great West, compagnie d’assurance-vie, des prestations d'invalidité entre le 9 janvier 2012 et le 18 octobre 2012.

            Le Syndicat prétend que la convention collective prévoit que les membres du Syndicat sont couverts par un régime d'assurance et que c'est la responsabilité de la Compagnie de s'assurer que les membres soient indemnisés adéquatement. Mme Bisson a suivi le processus d'appel de l'assureur et sa réclamation a toujours été refusée.

            Le Syndicat réclame toutes pertes monétaires encourues par Mme Bisson et que  la décision de la Great West et de la Compagnie est injustifiée.

            La Compagnie n’est pas d’accord. Elle soumet que selon l'assureur les critères d'admissibilité aux indemnités de courte durée n'étaient pas satisfaits. La Compagnie maintient de plus qu'elle a pleinement rempli ses obligations relativement au régime d'assurance-invalidité de courte durée. Enfin, elle maintient également que le régime d'assurance-invalidité de longue durée n’est pas du ressort de l'arbitre puisqu'il ne fait pas partie de la convention collective. II s'agit d'un régime au frais des employés syndiqués, parrainé par le Syndicat et dont les recours, s'il y a lieu, devraient se faire par l'entremise de ce régime et du Syndicat.

 

POUR LE SYNDICAT :                                       POUR LA COMPAGNIE :

Titre : Représentant syndical                                  Titre : Directrice principale, Relations de travail

(SGN.) L. Julien                                                   (SGN.) S. Grou

 

 

 

Représentaient la Compagnie :

D. Laurendeau                               – Directeur, Relations de Travail, Montréal

S. Grou                                           – Directrice principale, Relations de Travail, Montréal

J. Wilner                                         – Conseillère, Avantages sociaux

Dr. B. Laplante                               – Psychiatre, Québec

N. Taillon                                        – Directeur principal, Ingémere

 

Et représentaient le Syndicat :

L. Julien                                          – Représentant syndical, Montréal

M. Lacroix                                      – Délégué en chef, région du Québec et de l’Atlantique

J. Bisson                                         – Plaignante

 

SENTENCE ARBITRALE

 

            Le litige dont je suis saisie est fondé sur le refus par la Great West, compagnie d’assurance-vie, de verser des prestations d’invalidité à Mme Bisson entre le 9 janvier et le 18 octobre 2012. Mme Bisson a reçu des prestations d’invalidité de courte durée entre le 8 novembre 2011 et le 8 janvier 2012.

 

 La convention collective 10.1 stipule ce qui suit au paragraphe 41.1 de l’article 41 :

« Les membres du personnel bénéficient des avantages que prévoit l'Entente supplémentaire du 25 juillet 1986, dans sa version modifiée, révisée ou remplacée par toute entente à laquelle les parties aux présentes sont signataires. »

 

Dans la décision rendue relativement à la cause BACFC n2945 entendue le 12 mai 1998, l’arbitre Picher a bien fait comprendre qu’en vertu du paragraphe cité ci-dessus, les parties s’étaient entendues pour que la Compagnie assume le fardeau des avantages décrits dans l’Entente supplémentaire citée, et que tout défaut de fournir ces avantages est arbitrable.

 

 

            Dans cette décision, l’arbitre a invoqué la cause BACFC no 2849, dont le raisonnement s’applique au cas présent, pour formuler ce qui suit :

            I am satisfied that the above principles should apply in the instant case. On what basis, therefore, can the Arbitrator in this matter determine whether the decision of the insurance company’s claims examiner was rendered in good faith, for valid business purposes and without arbitrariness or discrimination? In this matter the Brotherhood bears the burden of proof. All that is presented to the Arbitrator are the medical opinion of the grievor’s physician, which it appears the insurance examiner rejected, and the written opinion of the grievor’s supervisor, communicated to the insurer, to the effect that he was malingering and that his claim was without merit. As the Courts have indicated, a conclusion that a person or corporation has acted in bad faith or in an arbitrary fashion should be based on evidence commensurate with so serious a finding.

 

In this case the Arbitrator is without any meaningful ability to understand or analyze the reasoning of the claims examiner or, for that matter, of the grievor’s physician. It was, of course, open to the bargaining agent to use this Office’s subpoena power to obtain the presence of those individuals, and to bring forth testimony which would have allowed a more substantial basis for a determination of the merits of this matter. Absent any such evidence, however, I am compelled to the conclusion that the Brotherhood has failed to discharge its burden of proof to establish, on the balance of probabilities, that the decision of the insurance examiner, and by extension of the Company, was taken in a manner which was arbitrary, discriminatory, in bad faith or without any valid business purpose.

 

For these reasons the Arbitrator is unable to determine that the grievor did have a meritorious claim, or that the insurer acted beyond the scope of the plan in coming to its conclusion.

 

For these reasons the grievance must be dismissed.

 

            Compte tenu de ce qui précède, il s’agit donc d’établir si la décision communiquée par l’examinatrice des demandes, soit la Great West, a été prise de bonne foi, pour des motifs valables, sans faire intervenir des motifs d’ordre arbitraire ou discriminatoire. Comme il est indiqué ci-dessus, pour en arriver à une telle conclusion, la preuve doit être proportionnelle à un verdict aussi grave.

 

Le dossier de la Compagnie révèle le fond de l’acte de procédure intenté par la Great West.  Après avoir passé en revue le dossier, il appert que la Great West a établi une expertise médicale indépendante avec le DLaplante. Le dossier a aussi été revu par le médecin-conseil de la Great West, qui abondait dans le sens de l’expert, à savoir que le problème de Mme Bisson était davantage une anxiété d’anticipation de son retour au travail, compte tenu du climat qui prévalait dans son lieu de travail. Après avoir reçu des renseignements médicaux supplémentaires, le DLaplante a de nouveau passé le dossier en revue. En fin de compte, après réception et examen de tous les renseignements fournis, le médecin-conseil de la Great West a maintenu qu’il n’y avait pas d’information médicale appuyant une invalidité et qu’une autre expertise n’était pas indiquée. Le 5 juillet 2012, le gestionnaire du dossier pour la Great West a maintenu la décision et rejeté l’appel de Mme Bisson.

 

            Je ne suis pas mieux placée que l’arbitre Picher dans le cas précité pour comprendre ou analyser le raisonnement de l’examinatrice des demandes, ni celui du médecin de la réclamante (dont j’ai du mal à déchiffrer l’écriture), ni celui de la psychologue de la réclamante. Il ne fait aucun doute que la Great West a pris sa décision après avoir été aiguillée vers un expert en médecine indépendant, qui a pris en compte tous les renseignements pertinents à sa disposition. Comme l’a exprimé l’arbitre Picher, l’agent négociateur avait la liberté de citer ces trois personnes à comparaître pour apporter des témoignages qui m’auraient permis de prendre une décision éclairée quant au bien-fondé de la présente cause.

 

            Dans la thèse que le Syndicat a présentée à l’audience, il semble clair qu’il est vivement en désaccord avec la décision de la Great West fondée sur les évaluations faites par le DLaplante, telles qu’elles ont été étudiées par l’examinatrice de la réclamation.

 

            Le Syndicat soulève des questions au sujet du rapport fait par DLaplante pour étayer son point de vue et selon lequel la réclamante satisfaisait les critères d’admissibilité aux indemnités de courte durée. Cela est loin d’établir de façon convaincante, selon la prépondérance des probabilités, que l’examinatrice des demandes, par conséquent la Great West, aurait pris une décision arbitraire, discriminatoire, de mauvaise foi ou sans motifs valables.

 

            Se demander pour la forme pourquoi la Compagnie n’a pas insisté  pour que Mme Bisson retourne immédiatement au travail, vu que la Great West avait décidé de refuser sa demande, ne sert en rien la thèse du Syndicat, ni le fait que Mme Bisson ait été jugée admissible à des prestations pour deux jours en janvier 2013. Et en dernier lieu, l’existence d’un comité de révision au sein de la Compagnie ne vient pas non plus appuyer son argument selon lequel l’examinatrice des demandes, soit la Great West, aurait pris une décision arbitraire, discriminatoire, de mauvaise foi ou sans motifs valables.

 

            Pour toutes ces raisons, je ne puis statuer que la plaignante avait un cas valable en droit ni que l’assureur a dépassé le cadre du régime pour arriver à sa conclusion.

           

            Ceci étant dit, la partie qui assume les coûts du régime, qu’il s’agisse d’un régime d’indemnisation de courte durée ou de longue durée, n’a aucune incidence sur l’arbitrabilité d’un différend.

 

 

Le 14 octobre 2013                                                                                                     L’ARBITRE

 

 

                                                                                                  __________________________

                                                                                                                   CHRISTINE SCHMIDT