BUREAU D’ARBITRAGE ET MÉDIATION
DES CHEMINS DE FER DU CANADA

 

CAUSE NO. 4264

 

entendu à Montreal, le 10 décembre 2013

 

opposant

 

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

 

et

 

LA CONFÉRENCE FERROVIAIRE DE TEAMSTERS CANADA

 

LITIGE :

 

Attribution de mauvais points au dossier de monsieur Tommy Arcand ayant conduit à son congédiement à compter du 8 mai 2013.

 

EXPOSÉ CONJOINT DU CAS :

 

            Le 31 mars 2013, monsieur Arcand fut tenu de produire une déclaration officielle en lien avec son absence en date du 7 février 2012, suite à laquelle la Compagnie lui impose vingt (20) mauvais points en date du 8 mai 2013.

Le Syndicat estime que cette mesure disciplinaire est infondée. Le 24 avril 2013, monsieur Arcand fut tenu de produire une déclaration officielle concernant une blessure survenue au mois de mai 2011, sans l’avoir rapportée à son superviseur. Suite à cette enquête, la Compagnie lui impose vingt (20) mauvais points en date du 8 mai 2013.

Le Syndicat estime que cette mesure relative à un événement de mai 2011 est infondée. Le Syndicat estime également qu’une enquête faite le 24 avril 2013 relativement à un événement qui s’est produit en mai 2011 est en contravention flagrante avec l’article 82.6 de la Convention Collective 4.16, qui impose une obligation de diligence à la Compagnie dans la conduite des enquêtes. Pour cette seule raison, le Syndicat estime que la mesure disciplinaire qui en est découlée est nulle ab initio. Au surplus, le Syndicat estime que même en présumant valides les deux mesures disciplinaires du 8 mai 2013, le dossier de M. Arcand aurait dû compter 35 mauvais points au 8 mai 2013, et non 75 mauvais points. Il s’ensuit que M. Arcand n’aurait en tout état de cause pas dû être congédié, et la fiche 780 à cet effet doit être annulée.

En effet, au moment du congédiement de M. Arcand, la Compagnie estime que son dossier disciplinaire compte 85 mauvais points. Suite à l’intervention du Syndicat, la Compagnie rectifie le dossier et le porte à 75 mauvais points en juin 2013. Toutefois, la Compagnie refuse de retirer 20 mauvais points malgré le passage de plus de 12 mois consécutifs sans mesure disciplinaire entre février 2012 et mars 2013, période durant laquelle M. Arcand était en invalidité totale. La Compagnie refuse également de retrancher 20 mauvais points pour la période comprise entre le 18 octobre 2010 et le 7 février 2012, puisqu’elle ne compte pas les périodes où M. Arcand était en congé maladie durant cette période de plus de 12 mois consécutifs. Le Syndicat conteste cette position de la Compagnie et estime que 40 mauvais points auraient dû être retranchés du dossier de M. Arcand relativement à ces deux périodes de plus de 12 mois consécutifs, estimant que la position de la Compagnie est en contravention avec la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Le Syndicat sollicite l’annulation des deux mesures disciplinaires, la rectification du dossier disciplinaire de M. Arcand et sa réintégration avec pleine compensation pour le salaire et avantages perdus depuis le 8 mai 2013.

La Compagnie rejette les demandes du Syndicat.

 

POUR LE SYNDICAT :                                       POUR LA COMPAGNIE :

Titre Le Président Comite général d’ajustement    titre Le Vice-président, Est du Canada

(SGN.) D. Joannette                                           (SGN.) J. Orr

 

Représentaient la Compagnie :

D. Larouche                                   – Directeur Relation de Travail, Montréal

D. Gagné                                        – Senior Manager, Relation de Travail, Montréal

G. Dunberry                                   – Surintendant, Joffre

J. Charette                                     – Trainmaster, Joffre

J. Girard                                         – Avocat, Service Juridique CN, Montréal

A. Daigle                                         – Manager, Relation de Travail, Montreal

 

Et représentaient le Syndicat :

S. Beauchamp                               – Avocat, Montréal

D. Joannette                                   – Président général CTY Région de l’Est Québec

P.P. St. Denis                                 – Retraité, Senne Terre

J. M. Hallé                                      – Président Général CGA Lignes de l’est, Lévis

T. Arcand                                       – Chef de train, Senne Terre

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

            Il s’agit de deux mesures disciplinaires. Chacune était de 20 mauvais points au dossier de M. Arcand.

 

            Le premier incident a eu lieu le 4 mai 2011. D’après le plaignant, il s’est blessé le dos ce jour-là en soulevant un appareil TIBS. Il ne semble pas contesté que le plaignant s’est absenté du travail par après, jusqu’au 1er septembre 2011. Cependant il n’a pas fait de réclamation contemporaine auprès de la CCST pour la blessure en question. M. Arcand prétend qu’il a laissé un formulaire de rapport d’accident dans le pigeonnier de son superviseur, M. Justin Charrette. Une copie du même document a également été acheminée à M. Jason Rodrique, représentant syndical en matière de santé et sécurité au travail. M. Charrette nie avoir reçu le document. Suivant cet incident le plaignant est resté en congé maladie jusqu’au 1er septembre 2011.

 

            Le 7 février M. Arcand a accepté un appel au travail. Il relate qu’il a répondu au téléphone lorsqu’il était couché dans son lit, et a tout de suite accepté l’appel au travail. Mais lorsqu’il s’est levé debout, il a senti une importante douleur au dos, ce qui l’a obligé de rappelé l’employeur pour se déclarer inapte à travailler. Après une enquête subséquente la compagnie lui a infligé une peine de 20 mauvais points pour s’être rapporté malade après avoir accepté un appel.

 

            L’évènement du 7 février a méné à une autre période d’absence en congé maladie, allant jusqu’au congédiement du plaignant le 8 mai 2013. Prétendant que le mal de dos ressenti le 7 février 2012 remontait à l’accident du 4 mai 2011, le 10 avril 2012 M. Arcand a fait un réclamation auprès de la CCST, réclamation qui fut refusée le 18 avril 2012.

 

            La Compagnie soutient que le plaignant a délibérément tenté d’induire l’employeur en erreur en réclamant seulement en avril 2012 une blessure supposément subie le 4 mai 2011. Après une enquête tenue le 31 mars 2013, elle lui a imposé 20 mauvais points pour s’être déclaré inapte après avoir accepté l’appel au travail le 7 février 2012. Une autre enquête a été menée le 24 avril 2013 en lien avec l’incident du 4 mai 2011, ce qui a entrainé une autre pénalité de 20 mauvais points pour la supposée tentative d’induire l’employeur en erreur. L’accumulation des mauvais points a alors entraîné le congédiement de M. Arcand. 

 

            Après mûre réflexion je considère que le plaignant a manqué à son devoir de communiquer clairement avec son employeur concernant sont état physique. Ce n’était pas suffisant de tout simplement glisser un formulaire dans le pigeonnier de M. Charrette avant de disparaître sans dire un autre mot pendant plusieurs mois. Il n’est donc pas étonnant de voir le scepticisme de l’employeur face à la réclamation faite à la CCST, presque un an plus tard, le 10 avril 2012.

 

            Cependant, force est de constater que M. Arcand souffrait d’une légitime condition physique relativement à son dos. Il n’est pas contesté qu’il a éventuellement subit une chirurgie au dos, qui semble avoir été un succès. Mais je dois en venir à la conclusion que le plaignant s’est rendu sujet a des mesures disciplinaires en raison de sa communication inadéquate à l’employeur concernant l’évènement du 4 mai 2011 et les circonstances de son éventuel refus de l’appel au travail le 7 février 2011. Cependant, à mon avis, l’ensemble de ces évènements ne démontre pas que le lien de confiance avec son employeur est irrémédiablement brisé.

 

 

 

            Le grief est donc accueilli, en partie. J’ordonne que le plaignant soit réintégré dans ses fonctions, sans perte d’ancienneté et sans dédommagement pour sa perte de salaire et d’avantages sociaux. Les 40 mauvais points seront soustraits de son dossier et une suspension pour la période en question y sera substituée.   

 

 

 

Le 16 décembre, 2013                                                                                                L’ARBITRE

 

 

 

                                                                                                  __________________________

                                                                                                                       MICHEL G. PICHER