BUREAU D’ARBITRAGE ET DE MÉDIATION
DES CHEMINS DE FER DU CANADA

CAUSE No 4418

 

Entendue à Montréal, le 16 octobre 2015

 

Opposant

 

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

 

Et

 

LE SYNDICAT DES MÉTALLOS – SECTION LOCALE 2004

 

LITIGE

            Congédiement de M. Daniel Langlois

 

EXPOSÉ CONJOINT DU CAS

            M. Langlois était congédié le 23 septembre 2014 pour avoir faussement déclaré un présumé accident de travail qui serait survenu le 17 août 2014.

            Le Syndicat prétend que le congédiement est une mesure disciplinaire abusive et excessive, et qu’il est victime de discrimination pour avoir été traité différemment d’autres employés dans des cas similaires. Le Syndicat réclame la réintégration de M. Langlois dans son poste permanent, considère qu’une mesure plus équitable comparativement à d’autres employés impliqués dans des cas similaires devrait être envisagée et qu’il soit réintégré avec remboursement de toute perte de salaire, avantages et bénéfices.

            La Compagnie est en désaccord et rejette le grief.

POUR LE SYNDICAT :                                 POUR LA COMPAGNIE :

Vice-Présidente

(SGN.) M. Lacroix                                         (SGN.) D. Laurendeau

Représentaient la Compagnie :

D. Laurendeau                      – Directeur, Relation de Travail, Montréal

S. Grou                                 – Directrice, Relation de Travail, Montréal

N. Taillon                              – Directeur Principal Engernière, Québec

G. Laroche                           – Supervisor, Senneterre

 

Et représentaient le Syndicat :

L. Julien                                – Representant, Montréal

J. F. Migreault                      – President Unite 284, Montréal

M. Lacroix                            – Delegue en chef province de Québec, Montréal

D. Langlois                            – Plaignant, Senneterre

 

SENTENCE ARBITRALE

 

            La présente sentence se rapporte au congédiement de M. Daniel Langlois (« le plaignant ») le 23 septembre 2014. Au moment de son congédiement, le plaignant occupait un poste d’agent de la voie à Senneterre, il avait cumulé six (6) mois de service actif auprès de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (« la Compagnie ») et son dossier disciplinaire était vierge. L’allégation selon laquelle il aurait faussement déclaré un présumé accident de travail concerne son affectation du 17 août 2014.

 

            Le jour en question, le plaignant faisait partie d’une équipe d’entretien de la voie comprenant un contremaître, soit M. Benoit Blouin (« M. Blouin »), et deux autres employés contractuels, soit M. Maxime Laflamme (« M. Laflamme ») et M. Michaël Ouellet (« M. Ouellet »).

 

            Ce jour-là, le plan de travail consistait, entre autres, à changer trois (3) rails de la subdivision St-Maurice. Après avoir exécuté le travail au point milliaire 227.84 et avant de se rendre au point milliaire 244.14, l’équipe devait remplacer un rail brisé. Le plaignant a participé à l’installation de ce bout de rail. Une fois le rail installé, l’équipe s’est déplacée vers le point milliaire 244.14 pour remplacer un autre bout de rail. 

 

            Par la suite, l’équipe est retournée à Senneterre pour terminer son quart de travail. Les membres de l’équipe sont passés par le dépôt de matériel où ils ont trié des anticheminants, les ont placés dans des barils qu’ils ont chargés par la suite dans leur camion. Une fois cette tâche complétée, l’équipe s’est dirigée vers l’édifice à bureaux du triage, où les quatre employés ont terminé leur journée de travail.

 

            Il n’est nullement contesté que le lundi 18 août 2014 tôt en matinée, le plaignant est entré en contact avec son superviseur, M. Gaétan Laroche (« M. Laroche »), et lui a demandé s’il pouvait prendre une journée de congé. Le plaignant souffrait d’une douleur au dos dont la cause était incertaine. D’après M. Laroche, le plaignant lui a fait savoir que sa douleur était apparue la veille au soir et que celle-ci s’était accentuée durant la nuit. Le plaignant a confié à M. Laroche qu’il avait porté ses orthèses personnelles dans ses bottes de travail pour la première fois lors de son quart de travail du 17 août 2014. Selon M. Laroche, au cours de cette brève conversation, le plaignant lui aurait dit qu’il avait fait sa journée de travail sans problème. Au terme de cette conversation, le plaignant a convenu de confirmer auprès de M. Laroche s’il serait en mesure de travailler le lendemain.

 

            Ce matin-là, peu après avoir parlé avec M. Laroche, le plaignant est entré en contact avec M. Blouin.  Bien que M. Blouin ait témoigné à l’audience que le plaignant ne lui avait jamais mentionné qu’il avait « forcé après un rail », d’après un texte présenté par le plaignant à l’audience, le plaignant avait signalé qu’il n’avait pas dormi de la nuit et qu’il ne savait pas s’il avait mal forcé après un rail ou si la cause de son mal au dos était ses orthèses. Il y a eu d’autres communications cette journée-là, mais il serait inutile de les rapporter dans le détail pour les besoins de la présente sentence.

 

            Le lendemain, soit le mardi 19 août 2014, le plaignant a communiqué de nouveau avec M. Laroche pour l’avertir qu’il avait pris des anti-inflammatoires et que sa douleur avait diminué de moitié, mais qu’il ne se sentait toujours pas en mesure de travailler.

 

            Le jour suivant, le mercredi 20 août 2014, le plaignant a consulté un médecin et s’est présenté au bureau de la Compagnie pour remettre un rapport médical de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) indiquant un diagnostic d’entorse lombaire et exigeant un arrêt de travail jusqu’au 23 août 2014. M. Laroche est entré en contact avec le plaignant pour lui demander pourquoi il avait rempli un billet de la CSST. Le plaignant a répondu qu’il ne savait pas comment il aurait pu se faire mal au dos autrement qu’au travail et qu’il croyait que c’était peut-être en manœuvrant des barils. C’était la première fois que le plaignant mentionnait à la Compagnie qu’il s’était peut-être blessé en manœuvrant des barils.

 

            Un examen de la déclaration du plaignant à l’enquête laisse supposer que celui-ci n’aurait pas mentionné à son médecin que le fait d’avoir manœuvré des barils avait contribué à ses maux de dos.

 

            Le lendemain, le jeudi 21 août 2014, la Compagnie a remis au plaignant un avis de se présenter à une enquête disciplinaire le 26 août 2014 pour y produire une déclaration relativement au déroulement de sa journée de travail du 17 août 2014, pour ne pas avoir probablement suivi les lignes directrices de la Compagnie lors d’un prétendu accident de travail et pour son absence du travail depuis le 18 août 2014.

 

            Le plaignant a rempli un rapport de blessure le vendredi 22 août 2014. Cette  déclaration se lit comme suit :

Nous étions à remplacer un rail brise d’une longueur de 26 pieds sub Ste Maurice en après-midi. Le boum n’était pas assez long pour mettre le rail en place c’est la que j’ai tiré après pour l’avancer et que j’ai mal force ca piquer au niveau des reins et en terminant le shift j’ai eu bougé 2 chaudières d’anticheminants. Dans la [illegible] qui était mal rangée il était 4:45 pm et en sortant de la station c’est la que j’ai ressentie une douleur vive au bas du dos.

 

 

      Lors de l’enquête du 26 août 2014, le plaignant a relaté en ces mots les circonstances entourant la blessure qu’il aurait subie pendant son affectation :

 

R.        On part du mile 227.84 subdivision St-Maurice pour y remplacer un rail casser qui a été détecter par le superviseur adjoint M Eric Lalancette c'était un rail PGT. On avait à mettre un 26 pieds de rail avec 2 contracteur (Michael et Maxime) et Benoit Blouin avait la télécommande du tfo. Il a débarquer la rail et pour l'approcher un contracteur a mis une pelé carrer dans le bout de la rail pour être capable de la glisser au sol pour ne pas quelle pique dans le balast, on est rendu au bout de l'extension et il manquait environ 2 pieds, la j'ai dit a Benoit levé les du bout arrière et je vais tirer sur le rail et c'est en tirant le rail que j'ai ressenti un piquotement, brulure au niveau des reins. Toute la journée c'est moi qui avais fait les coupes avec la scie. Après le piquotement je me suis étirer un peu pour chasser la douleur et le mal est comme parti. Nous avons fini notre changement de rail. Nous avons quitté les lieux et c'est moi qui conduisait le TFO, nous nous sommes rendu au mile 244 pour changer aussi 15 pieds de fer et la j'ai seulement fait les 2 coupes et j'ai laissé le reste au contracteur. C'est eux qui on fait les trous et spiker le rail. Ensuite on est parti en direction de la cour triage Senneterre, vers 16h15 nous sommes arrivé à Senneterre. On est aller porter la scrap dans la bin a fer et au même endroit il a le dépôt de spike qui est environ 25 pieds du conteneur a fer donc benoit nous a demander de trier des anti-cheminant 100lbs parce qu'il en avait plus dans le camion. On a trier 2 chaudières qui était pleine au rebord et je suis allé les porter dans le devant de la boite du camion. Pour aller les porter j'ai du enjamber le panneau noir qui empêche le matériel de sortir de la boite ainsi qu'une pile de strap (eclisse), la scie pour couper le fer hydraulique, un paquet de tie plate qui était au bord pour aller porter les chaudière au devant de la boite du camion et c'est la qu'une douleur vive commençant de 0 jusqu’à 10 en fait de mal est survenu. Là j'ai débarqué du camion et j'ai dit au autre gars qu'on allait manger vu qu'il était 16h45. Nous nous sommes en venu à la station et les trois autres qui était avec moi sont allé directement dans l'office et moi j'ai barré les 2 cadenas du TFO pour empêcher les 2 coffres d'ouvrir. J’ai ramassé mes choses et je me suis envenu a l'intérieur. A 16h55 les autres gars sont partis et moi je n'est pas été capable d'aller porter mon équipement en bas dans ma case et toute mes chose sont rester dans le lunch room. Je suis partis chez moi et la douleur a persister a

10 en niveau de mal.

Je veux aussi dire que lorsque j'ai bouger le rail au mile 227.84, j'ai par la suite dit a Benoit qu'il avait des dimanche plus dure que d'autre et Benoit est parti a rire.

                       

 

            Pour donner suite à la déclaration du plaignant, la Compagnie a communiqué avec MM. Laflamme et Ouellet. Tous deux ont confirmé qu’ils ne savaient pas que le plaignant s’était blessé durant la journée de travail du 17 août 2014. Ils ont aussi confirmé que pendant ce quart de travail, le plaignant n’avait fait aucune allusion que ce soit à un malaise.

 

            La Compagnie a convoqué le plaignant à un complément d’enquête qui a eu lieu le 11 septembre 2014. Lors de sa deuxième déclaration, le plaignant s’est vu présenter la déclaration de MM. Laflamme et Ouellet, ainsi qu’une séquence vidéo de l’arrivée de l’équipe à l’édifice à bureaux à la fin du quart de travail du 17 août 2014.

     

            Dans une décision datée du 7 janvier 2015, la CSST a rejeté la demande du plaignant, parce qu’elle jugeait tardive la déclaration de l’événement du plaignant à son employeur, et que les autres éléments de preuve au dossier ne permettaient pas de conclure que la blessure du travailleur était survenue sur les lieux de travail pendant l’exercice de ses fonctions. Je note que dans sa décision, qui, paraît-il, aurait été portée en appel, la CSST a fait allusion au fait que le plaignant avait juré qu’il avait parlé à M. Laroche au téléphone le 18 août 2014 des deux événements mentionnés dans la déclaration reproduite plus haut. Ceci n’était cependant pas le cas, d’après la version des faits du plaignant.

 

Décision

 

            Dans la présente affaire, il s’agit d’établir si le plaignant a faussement déclaré un présumé accident de travail. L’allégation faite par la Compagnie est très grave. Il faut retenir, cependant, que ce qu’il importe de déterminer dans la présente affaire n'est pas si le plaignant est en droit ou non de recevoir des indemnités pour un accident de travail dans le cadre de la loi applicable, mais plutôt de déterminer si le plaignant aurait trompé son employeur concernant la blessure qu’il aurait prétendument subie pendant son affectation de manière à justifier l'application de sanctions disciplinaires à son égard. Il s'agit d'établir si le plaignant a délibérément cherché à tromper son employeur en ce qui concerne ses intérêts.

 

            La présente affaire met en cause la crédibilité du plaignant. La véracité de sa version des faits réside dans sa conformité à la prépondérance des probabilités qu’une personne informée et douée de sens pratique reconnaîtrait d’emblée comme étant raisonnable (voir Faryna v. Chorny, [1951] 2 D.L.R 354, page 357).

 

            J’ai soigneusement étudié les déclarations faites durant l’enquête par le plaignant, ainsi que celles qui ont été faites par MM. Blouin, Laroche, Laflamme et Ouellet, de même que la séquence vidéo montrée au plaignant. Je n’ai nullement l’intention de passer en revue tous les problèmes que soulèvent les deux déclarations faites par le plaignant durant l’enquête, ce que la Compagnie a très bien fait dans son exposé. Je note cependant que la déclaration de M. Blouin est très brève et qu’elle n’a nullement abordé ce que le plaignant prétend avoir dit après qu’il a tiré sur le rail et ressenti un picotement aux reins : « il y a des dimanches plus durs que d’autres ».

 

            Les déclarations du plaignant montrent qu’on ne peut compter sur lui pour être honnête avec son employeur. Après avoir examiné avec soin les déclarations du plaignant, ainsi que les autres preuves qui m’ont été présentées, je ne peux que conclure qu’il a inventé une histoire de toutes pièces, dans son intégralité ou plus probablement en partie, concernant ce qui s’est passé durant son quart de travail relativement à la blessure qu’il aurait subie.

 

            Les problèmes les plus évidents dans les déclarations faites par le plaignant sont énoncés ci-dessous :

·        Le plaignant savait très bien qu’il était tenu de signaler toute blessure subie pendant son quart de travail au moment où celle-ci est survenue. Le plaignant a laissé entendre qu’il avait signalé sa blessure clairement et sans ambiguïté à M. Blouin quand il a dit qu’il avait tiré sur le rail. Laissant de côté le conflit entre M. Blouin et le plaignant concernant le fait que ce dernier aurait tenté ou non de soulever le rail tel qu’il est décrit dans sa déclaration, le plaignant n’a jamais signalé sa blessure à M. Blouin. Dans sa deuxième déclaration, le plaignant a admis ce point.

 

·      Le plaignant a lui-même admis qu’il n’avait pas signalé à M. Blouin, ni à M. Laflamme, ni à M. Ouellet le fait qu’il avait ressenti une douleur vive commençant à 0 et allant jusqu’à 10, comme il l’a décrit dans sa première déclaration. Ce n’est qu’après avoir consulté son médecin qu’il a révélé à la Compagnie qu’il avait aggravé sa prétendue blessure en manipulant des barils d’anticheminants (ce qu’il n’a d’ailleurs pas signalé à son médecin).

 

·        Selon le rapport d’accident rempli par le plaignant le 22 août 2014, celui-ci aurait ressenti une douleur vive en sortant de la station. La première fois qu’on lui a demandé d’expliquer l’écart entre les deux déclarations, le plaignant a éludé la question de la Compagnie. Il affirme que dans son rapport d’accident, il mentionne une autre douleur que celle à laquelle il est fait allusion dans sa déclaration et confirme qu’en sortant de la station, il avait mal au dos. Au cours du deuxième entretien, le plaignant a précisé que la douleur qu’il avait décrite s’était poursuivie depuis le moment où il avait manipulé des barils jusqu’au moment où il a débarqué du camion et est arrivé à l’édifice à bureaux.

 

·      Ni l’une ni l’autre version fournie par le plaignant n’est crédible à première vue. Il n’est pas vraisemblable que le plaignant aurait subi une blessure comme celle qu’il a lui-même décrite sans qu’il signale aux personnes qui travaillaient avec lui qu’il ressentait une douleur vive ou sans que ces personnes ne remarquent qu’il avait mal. Il n’y a rien qui puisse raisonnablement justifier le délai dans le signalement par le plaignant de l’incident qui aurait aggravé, selon lui, ses maux de dos.

 

·      La douleur intense que le plaignant dit qu’il ressentait à la fin de son quart de travail et sa déclaration selon laquelle il se disait incapable de porter ses sacs ne concordent pas avec la séquence vidéo où il se penche pour ramasser ses effets et les transporter sans aucune difficulté du camion jusqu’à l’édifice à bureaux, puis jusqu’à son propre véhicule.

 

·      Le plaignant a également affirmé qu’il avait voulu parler à M. Blouin au sujet de la blessure qu’il avait subie en manipulant des barils, mais que M. Blouin était parti trop vite. Le fait est que le plaignant était à bord du camion avec son équipe depuis le dépôt de matériel jusqu’à l’édifice à bureaux. La séquence vidéo montre que le plaignant et son équipe sont entrés dans l’édifice et sont partis ensemble. Le plaignant avait eu tout le temps nécessaire pour signaler sa blessure à M. Blouin, mais ne l’a pas fait quand il en avait eu la chance.

 

·      Pendant le deuxième entretien, le plaignant est revenu sur ce qu’il avait dit. Il a déclaré ne pas avoir signalé sa douleur (qu’il avait décrite comme étant d’une intensité de 10 sur 10) parce qu’il croyait qu’elle allait sûrement se résorber. Il a ensuite cherché à clarifier, de façon peu convaincante, ce qu’il avait voulu dire en déclarant la première fois qu’il n’avait pas signalé la blessure parce que M. Blouin était parti trop vite. La seule conclusion plausible à laquelle nous pouvons arriver est que le plaignant a modifié sa réponse quand on lui a présenté des preuves qui ne concordaient pas avec les renseignements qu’il avait fournis à son employeur.

 

 

            Dans son exposé, la Compagnie a avancé une théorie pour expliquer ce qui aurait pu motiver le plaignant à inventer une histoire relativement à la blessure qu’il aurait subie en milieu de travail. La Compagnie a expliqué comment le plaignant pourrait tirer profit financièrement en présentant une demande de prestations d’accident de travail plutôt qu’une demande de prestations d’invalidité de courte durée. Bien qu’il soit possible que la Compagnie ait raison, celle-ci n’a pas réussi à prouver sa théorie.

 

             À mon avis, compte tenu de toutes les preuves qui m’ont été présentées, la prépondérance des probabilités me porte à conclure que le plaignant ne connaissait pas la cause de ses maux de dos après son affectation du 17 août 2014. Le lendemain matin, le plaignant n’en connaissait toujours pas la cause. Il a pensé que ses maux de dos pourraient avoir commencé quand il a mal forcé sur un rail. Il a aussi pensé que ses maux de dos pouvaient s’expliquer par le fait qu’il avait porté ses orthèses personnelles dans ses bottes de travail. Le mercredi, le plaignant attribuait ses douleurs lombaires au fait qu’il avait « tiré après un rail ». Selon l’ensemble de la preuve, je conclus qu’il est plus probable que le plaignant ait vraiment ressenti des picotements aux reins et qu’il ait bel et bien dit « il y a des dimanches plus durs que d’autres ». Comme il a été mentionné précédemment, la remarque que le plaignant dit avoir adressée à M. Blouin n’a jamais été confirmée ni réfutée par celui-ci.

 

            La culpabilité du plaignant dans l’affaire qui nous occupe réside dans le fait qu’il s’est alors mis à inventer une histoire qui dépasse l’entendement pour appuyer sa déclaration de préjudices corporels. La version des faits qu’a donnée le plaignant pour la première fois le 26 août, et que la Compagnie a redemandée le 11 septembre 2014, ne tient tout simplement pas. Je conclus que le plaignant a été malhonnête avec son employeur et qu’il a inventé la douleur vive allant de 0 à 10 qu’il aurait ressentie quand il a manipulé les barils d’anticheminants. Il a inventé cette douleur par la suite pour appuyer sa version selon laquelle sa douleur, comme il en était venu à le croire, était due au fait qu’il avait mal forcé sur un rail.

 

            Les déclarations faites par le plaignant en donnant à la Compagnie sa version des faits et en répondant aux questions de la Compagnie au sujet de ce qui s’était passé le 17 août 2014 sont remplies de contradictions et d’invraisemblances.

 

            La Compagnie est en droit de s’attendre à ce que le plaignant soit honnête et digne de confiance. Dans l’affaire qui nous intéresse, la Compagnie s’est acquittée du fardeau de la preuve en montrant que le plaignant n’avait pas été honnête relativement à une blessure qui serait survenue le 17 août 2014. Dans un extrait de SHP 564, l’arbitre Hope écrivait ce qui suit :

A review of the authorities supports the conclusion that falsifying claims of disabling injuries is extremely serious misconduct, which in the absence of strong mitigating factors is deserving of dismissal. In that context Arbitrator Picher noted in CROA&DR 2302, that ‘to the present the grievor appears not to understand the seriousness of his actions and inconsistencies.

 

            Dans l’affaire dont je suis saisie, le plaignant fait preuve de la même inconscience.  Il ne saisit toujours pas la gravité de sa tromperie. D’après les preuves qui m’ont été présentées, le plaignant a trompé délibérément l’employeur concernant sa blessure corporelle en décidant après coup qu’elle avait été subie en milieu de travail le 17 août 2014. Il a continué de débiter ce mensonge devant moi et a rompu le lien de confiance essentiel à ses relations de travail avec la Compagnie.

 

            Comme il s’agit d’un employé avec très peu d'ancienneté, et pour tous les motifs susmentionnés, je ne vois aucune raison de modifier la décision de la Compagnie. Le grief doit être rejeté.

 

 

Le 18 novembre 2015                                                                       L’ARBITRE

 

 

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                                                                                                   CHRISTINE SCHMIDT