BUREAU D’ARBITRAGE ET DE MÉDIATION
DES CHEMINS DE FER DU CANADA

 

CAUSE NO 4427

 

Entendue à Calgary, le 13 novembre 2015

 

 

Opposant

 

 

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

 

 

Et

 

 

LA CONFÉRENCE FERROVIAIRE DE TEAMSTERS CANADA

 

 

LITIGE

            Les violations flagrantes, indéfendables et répétées de la Convention Collective, sentences arbitrales et ordonnances du Conseil canadien des Relations Industrielles et en considération desdites violations, les mesures correctives appropriées selon les dispositions de l’Annexe 123 de la Convention Collective 4.16.

 

EXPOSÉ DU CAS PAR LE SYNDICAT

            Le Syndicat soumet que relativement à chacun des griefs figurant à l’Annexe A, la Compagnie a violé : 1. l’article 51 de la Convention Collective 4.16;  2.  les dispositions en matière de milieu de travail de la Convention Collective 4.16;  3. les ordonnances antérieures injonctives que renferment les décisions arbitrales;  4.  les ordonnances du Conseil canadien des Relations Industrielles de s’abstenir de contrevenir aux dispositions de la Convention Collective 4.16.

 

            Le Syndicat demande qu’en raison des violations manifestes de la Convention Collective et des ordonnances par la Compagnie que l’arbitre :

 

1)    Déclare que la Compagnie a, de manière flagrante, violé l’Article 51 et les dispositions en matière de milieu de travail de la Convention Collective 4.16;

 

2)    Déclare que la Compagnie a, de manière flagrante, violé les ordonnances arbitrales et celles émises par le Conseil canadien des Relations Industrielles de cesser les violations de la Convention Collective;

 

3)    Ordonne à la Compagnie de cesser les violations des demandes de repos faites à la Compagnie par ses employés au regard de la Convention Collective 4.16;

 

4)    Ordonne à la Compagnie de prendre toutes les mesures nécessaires afin de respecter et de faire respecter les engagements qui sont les siens quant aux demandes de repos en vertu de l’article 51 de la Convention 4.16;

5)    Ordonne à la Compagnie de payer au Syndicat un redressement au montant de 500,000$ en vertu des dispositions de l’Annexe 123 de la Convention Collective 4.16;

 

6)    Ordonne à la Compagnie de payer une rémunération équivalente à 300 milles pour chacune des réclamations soumises;

 

7)    Ordonne à la Compagnie de payer tous les frais, y compris les honoraires d’avocat, engagés pour le présent dossier;

 

8)    Ordonne à la Compagnie qu’elle fasse immédiatement parvenir une copie de la sentence arbitrale à intervenir à tous ses gestionnaires impliqués dans le traitement, à tous les niveaux, de demandes de repos faites en vertu de conventions collectives conclues avec le Syndicat au regard de la Convention collective 4.16;

 

9)    Ordonne toute autre mesure corrective jugée appropriée par l’arbitre;

 

10) Rende toute autre ordonnance jugée appropriée par l’arbitre.

 

La Compagnie n’est pas d’accord.

 

POUR LE SYNDICAT :                                       POUR LA COMPAGNIE :

Le président                                                        Titre

(SGN.) D. Joannette                                           (SGN.)

 

Représentaient la Compagnie :

A. Daigle                                         – Directrice, Relations de travail, Montréal

D. Laurendeau                               – Directeur, Relations de travail, Montréal

 

Et représentaient le Syndicat :

S. Beauchamp                               – Avocat, Montréal

D. Joannette                                   – Président général, Québec (via conférence téléphonique)

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

            La présente sentence vise l’objection préliminaire de la Compagnie concernant vingt-cinq (25) des griefs figurant à l’annexe A de l’exposé des faits du Syndicat. La Compagnie soutient que 25 desdits griefs n’avaient pas été déposés dans les délais prescrits au moment de la demande d’arbitrage présentée par le Syndicat le 3 mars 2014, et ne sont donc pas arbitrables.

 

            L’exposé présenté par le Syndicat se rapporte à des griefs déposés entre 2010 et 2013 pour contester des violations de l’article 51. Le 26 mai 2014, le Syndicat a fait parvenir un exposé des faits au Bureau d’arbitrage des chemins de fer (ci-après le « BAMCFC »). La Compagnie a pris acte de son objection de tardiveté dans les jours qui ont suivi. La Compagnie a réitéré son objection et précisé les 25 griefs en litige dans la lettre qu’elle a fait parvenir au BAMCFC le 25 mars 2015.

 

            L’article 84 de la convention 4.16 régit la procédure de règlement des griefs et les délais prévus à chaque stade du processus. Le libellé de l’article 84 se lit en partie comme suit :

ARTICLE 84 Procédure de règlement des griefs

84.2

c)         Stade 3 – Appel au vice-président

1)         Le président général peut en appeler par écrit au vice-président régional dans les 60 jours civils suivant la décision rendue au stade 2. L'appel doit être accompagné des arguments du Syndicat et de tous les renseignements pertinents relatifs au grief, et :

2)         si le président général du Syndicat et le vice-président de la Compagnie ou leurs délégués respectifs sont d’accord, l’appel doit être examiné au cours d'une réunion des deux parties qui doit avoir lieu dans les 60 jours civils suivant la date de l'appel. Le vice-président doit ensuite faire connaître sa décision par écrit dans les 30 jours civils qui suivent la date de la réunion; ou

3)         si le président général ou encore le vice-président estime qu'un grief donné ne justifie pas la tenue d'une réunion et qu’aucune entente à ce sujet ne soit conclue, le vice-président rend une décision par écrit dans les 60 jours civils qui suivent la date de l'appel.

 

Règlement définitif des différends

84.3     Si le différend soumis à la procédure de règlement des griefs n'est pas résolu au stade 3 après appel au vice-président, l'une ou l'autre des parties peut alors en saisir le Bureau d'arbitrage des chemins de fer du Canada pour obtenir un règlement définitif et exécutoire sans occasionner d'arrêt de travail.

(Voir annexe 22)

84.4     La demande d'arbitrage doit se faire dans les 60 jours civils qui suivent la décision écrite rendue par le vice-président et consiste en un avis écrit adressé au Bureau d'arbitrage des chemins de fer du Canada. Copie de l'avis doit être remise à la partie adverse le même jour.

NOTE : En application des dispositions du présent paragraphe, la Compagnie et le président général doivent se rencontrer dans les 30 jours civils qui suivent la réception d'une demande d'arbitrage afin de mettre au point l'exposé conjoint du cas demandé. Si les dispositions du présent paragraphe ne sont pas respectées, le litige peut être présenté au Bureau d'arbitrage des chemins de fer du Canada par une seule partie, conformément aux termes de l'avenant régissant ce Bureau.

 

Délais non respectés

84.5     Si le Syndicat néglige de suivre le cours normal de la procédure dans les délais prescrits, le différend est considéré comme résolu par la dernière décision rendue et ne peut plus faire l'objet d'appel. Le règlement d'un différend de cette façon ne constitue pas un précédent pas plus qu'il n'infirme le point de vue du Syndicat quant à la cause considérée ou toute autre cause semblable. Si le cadre compétent de la Compagnie omet de rendre sa décision en temps voulu, il est permis de passer au stade suivant, sauf dans le cas prévu au paragraphe 84.6.

….

84.9     Les délais prévus au présent article peuvent être prorogés d’un commun accord.

 

 

 

            L’article 84 de la convention collective 4.16 renvoie à l’annexe 22 de cette même convention. Le septième point de l’annexe 22 brosse un tableau des délais prescrits pour le dépôt d’un grief à l’arbitrage, tableau qui est entièrement compatible avec les délais prescrits à l’article 84 :

Annexe 22

BUREAU D’ARBITRAGE DES CHEMINS DE FER DU CANADA


7.   Aucun litige du type stipulé au paragraphe 4 A) ne pourra être soumis à l’arbitre avant d’avoir été traite au dernier stade de la procédure de règlement des griefs, conformément à la convention collective applicable. A défaut de règlement définitif du grief suivant cette procédure, on pourra faire une demande d’arbitrage de la façon et dans les délais stipules dans la convention applicable ou s’il n’y a pas de délai de prévu dans la convention relativement aux litiges du type stipule au paragraphe 4 A), dans les 60 jours qui suivent la décision rendue au dernier stade de la procédure de règlement des griefs.

Aucun litige du type stipule au paragraphe 4 B) ne pourra être soumis à l’arbitre avant d’avoir d’abord été traite aux différents stades prévus dans la convention collective applicable.

 

 

            Des 25 griefs visés par l’objection préliminaire de la Compagnie, neuf ont été rejetés au stade 3 dans les délais prévus au paragraphe 84.2. Environ trois ans après la réponse écrite de la Compagnie rejetant les griefs (et au bout d’un délai de deux ans dans l’un des cas), le Syndicat a soumis les griefs à l’arbitrage. Suite à la réponse de la Compagnie, le Syndicat avait sollicité une conférence conjointe, demandant que les délais soient protégés jusqu’à la date de conférence proposée. Or, en dépit de la tenue de plusieurs conférences conjointes, aucune discussion de ces griefs n’a eu lieu et le Syndicat n’a pris aucune mesure pour protéger les délais ou faire avancer ces neufs griefs à l’étape de l’arbitrage.

 

            Cinq des 25 griefs visés par l’objection préliminaire ont été rejetés au stade 3 dans les délais prévus au paragraphe 84.2 et ont été soumis à l’arbitrage le 19 octobre 2012 ou le 6 mai 2013, avec une note à l’effet qu’un projet d’exposé conjoint dans chacun de ces cas serait transmis à la Compagnie sou peu. Aucun projet d’exposé n’a suivi. Au lieu de cela, le 3 mars 2014 (soit entre 10 et 16 mois plus tard), le Syndicat a soumis une deuxième demande d’arbitrage accompagnée d’un projet d’exposé conjoint des faits.

 

            Neuf autres parmi les 25 griefs visés par l’objection préliminaire ont été rejetés au stade 2 dans les délais prescrits et ont été portés au stade 3, lorsque la Compagnie a omis de répondre dans les délais prévus par la convention. Ces neuf griefs ont été retournés au Syndicat entre les mois de janvier et de juillet 2011. Le Syndicat avait 60 jours suite au retour de ces griefs pour agir. Les griefs devaient donc être soumis à l’arbitrage entre les mois de mars et septembre 2011. Aucune mesure n’a été prise par le Syndicat. Ces griefs ont été ajoutés au projet d’exposé conjoint qui figure à l’annexe A de la demande d’arbitrage déposée le 3 mars 2014.

 

            Les deux derniers griefs nommés dans l’objection préliminaire de la Compagnie ne relevaient pas des trois catégories identifiées plus haut. Le grief 2012-214 a été rejeté par la Compagnie au stade 2. Le 7 juillet 2012, la Compagnie a sollicité une conférence indiquant une disponibilité pour la semaine du 13 août, mais le Syndicat n’a jamais donné suite à cette demande. La demande d’arbitrage aurait dû être déposée vers le 13 novembre 2012. Ce grief a été ajouté au projet d’exposé conjoint au moment de la demande d’arbitrage faite le 3 mars 2014. Le dernier grief visé par l’objection préliminaire de la Compagnie est le grief 2010-415. Suite à l’appel du Syndicat au stade 3, la Compagnie a sollicité une conférence. Comme pour les griefs de la première catégorie mentionnée plus haut, ce grief était inscrit à l’ordre du jour d’une conférence prévue le 1er juin 2011, mais n’a jamais fait l’objet d’une discussion. Ce n’est que deux ans et demi plus tard, soit le 3 mars 2014, que le Syndicat a ajouté ce grief à l’exposé conjoint des faits présenté à la Compagnie.

 

            La Compagnie soumet que dans tous les cas précités, nonobstant les circonstances propres à chaque catégorie, le Syndicat, par son inaction, est réputé avoir abandonné les griefs.

 

            Le Syndicat ne nie aucunement que la convention collective 4.16 prévoit des délais très précis à chaque étape du processus de règlement des différends et lui permet de faire passer un grief au stade suivant si la Compagnie omet de répondre ou d’agir à l’une ou l’autre des étapes. Le Syndicat ne nie pas non plus les conséquences qui s’ensuivent en vertu du libellé du paragraphe 84.5, qui stipule ce qui suit : « Si le Syndicat néglige de suivre le cours normal de la procédure dans les délais prescrits, le différend est considéré comme résolu par la dernière décision rendue et ne peut plus faire l'objet d'appel ».

 

            Le Syndicat attire cependant mon attention sur le libellé du paragraphe 84.9. Ce paragraphe stipule la prorogation des délais prévus si les parties sont d’accord. Le Syndicat soutient que les parties, si l’on tient compte de l’historique du litige concernant l’article 51, ont convenu verbalement de garder en suspens tous ces griefs après le stade 3 de la procédure de règlement, afin que ceux-ci puissent être discutés collectivement par les parties lors de conférences conjointes. Depuis 2000, le Syndicat affirme que les parties ont toujours convenu de traiter ces griefs en groupe lors de conférences conjointes ou en arbitrage. La Compagnie prétend que ce n’était pas du tout le cas. En ce qui concerne les griefs présentés dans l’argumentation écrite du Syndicat, l’affirmation de celui-ci ne semble pas bien fondée.

 

            À l’appui de la position du Syndicat selon laquelle il aurait conclu une entente verbale visant à garder en suspens les griefs relatifs à des violations de l’article 51 après le stade 3, le Syndicat attire mon attention sur plusieurs indices qui, selon lui, confirment l’entente qu’il aurait conclue avec la Compagnie.

 

            Je ne peux statuer que les indices sur lesquels s’appuie le Syndicat prouvent l’existence d’une telle entente. Premièrement, la Compagnie a signifié son objection au Syndicat dans les jours suivant la soumission de l’exposé des faits au BAMCFC demandant que le litige soit inscrit au rôle du BAMCFC pour une audience en juin 2014. La Compagnie n’aurait eu aucune raison de soulever son objection avant qu’elle apprenne que le Syndicat comptait soumettre ces griefs à l’arbitrage en mars 2014, la plupart de ces griefs ayant été déposés en 2010 et en 2011 (et quatre d’entre eux ayant été déposés en 2012). Deuxièmement, contrairement aux affirmations du Syndicat, j’ai soigneusement étudié les commentaires concernant les formulaires de réclamation présentés aux onglets mentionnés dans son dossier supplémentaire. Ces commentaires ne confirment pas clairement « l’entente procédurale » à laquelle le Syndicat fait allusion. Ils ne confirment aucunement l’existence d’une entente. De plus, la valeur probante de la correspondance mentionnée par le Syndicat relativement à un grief déposé en 2013, qui n’est lié à aucun de ceux qui sont énumérés dans la demande d’arbitrage, m’échappe. Pour terminer, le fait que cinq des 25 griefs relatifs à l’objection préliminaire ont été rejetés au stade 3 et soumis à l’arbitrage, avec une note à l’effet qu’un projet d’exposé conjoint dans chacun des cas suivrait sou peu, ne concorde pas avec l’entente verbale qu’aurait conclue les parties. Enfin, compte tenu de l’importance qu’accorde le Syndicat aux violations de l’article 51, il dépasse l’entendement que l’entente procédurale qui est censée avoir été conclue n’aurait pas été consignée par écrit. Pour tous ces motifs, je conclus qu’aucune entente n’avait été convenue pour garder en suspens les 25 griefs visés après le stade 3 afin qu’ils puissent être discutés collectivement lors de conférences conjointes.

 

            À la lumière de ma conclusion, je n’ai aucune explication valable pour la soumission excessivement tardive, par le Syndicat, des 25 griefs dont je suis saisie. Le délai moyen est de l’ordre de 36 mois. En effet, les 28 causes jugées hors délais par la Compagnie s’échelonnent sur une période allant du 10 avril 2010 au 28 août 2012 (seuls quatre d’entre elles datent de 2012).

 

            Dans une alternative à sa principale position, le Syndicat propose que je m’avalise des pouvoirs qui me sont conférés par l’article 60(1.1) du Code canadien du travail, qui dispose que :

« 60 (1.1). L’arbitre ou le conseil d’arbitrage peut proroger tout délai — même expiré — applicable aux procédures de grief ou à l’arbitrage prévu par la convention collective s’il est d’avis que la prorogation est justifiée et ne porte pas atteinte indûment aux droits de l’autre partie. »

 

Dans la décision BAMCFC 3493, l’arbitre s’est exprimé ainsi :

In the leading decision of Re Becker Milk Company Ltd. and Teamsters Union, Local 647 (1978), 19 L.A.C. (2d) 216 (Burkett), a board of arbitration was called upon to consider the virtually identical provisions of the Ontario Labour Relations Act, R.S.A. 1970, c. 232, s. 35(5a), the board of arbitration found that it was appropriate to consider three factors: the reason for the delay given by the offending party; the length of the delay; and the nature of the grievance.

Boards of arbitration have made it clear that where it is apparent that there was unexplained laxity on the part of the offending party in progressing a grievance, it may not be appropriate for a board of arbitration to exercise its discretion to relieve against the time limits. (See, e.g., Re Corporation of the City of Brantford and Canadian Union of Public Employees, Local 181 (1983), 9 L.A.C. (3rd) 289 (Samuels); Re Helen Henderson Care Centre and Service Employees’ Union, Local 183 (1992), 30 L.A.C. (4th) 150 (Emrich); Re Laidlaw Transit Ltd. and Canadian Union of Public Employees, Local 2151 (2000), 93 L.A.C. (4th) 386 (Devlin).)

 

            Dans l’affaire CROA&DR 3762, l’arbitre Picher a abordé une objection de tardiveté concernant 14 griefs relatifs à des violations de l’article 51. Dans cette affaire, l’arbitre Picher s’est demandé s’il était raisonnable d’accorder une prorogation des délais prescrits et si, ce faisant, il ne porterait pas indûment atteinte à la Compagnie. Les 14 griefs dont l’arbitre Picher était saisi ont fait l’objet de discussions lors d’une conférence conjointe qui a pris fin le 30 octobre 2008. Le Syndicat avait jusqu’au 29 décembre 2008 pour soumettre 10 d’entre eux à l’arbitrage et jusqu’au 15 février 2009 pour soumettre les quatre autres. Dans l’affaire CROA&DR 3762, le Syndicat avait fait parvenir une lettre à la Compagnie le 4 décembre 2008, lui déclarant qu’il estimait l’entente proposée inacceptable et qu’il « …allait saisir le Bureau d’arbitrage et de médiation des chemins de fer du Canada de ces griefs, qui seront traités ensemble et séparément » (traduction de l’anglais). Bien que l’arbitre Picher ait jugé que la lettre du Syndicat ne constituait pas la demande d’arbitrage envisagée au paragraphe 84.4 de la convention collective, il a écrit ce qui suit :

However, with respect to the alternative submission of the Union concerning the exercise of the Arbitrator’s discretion, I do not consider that the letter of December 4, 2008 is entirely irrelevant. For the purposes of the Canada Labour Code the Arbitrator must consider whether it is reasonable to grant an extension of the time limits and whether to do so would unduly prejudice the other party. I have difficulty on the facts of the case at hand in appreciating what prejudice would be visited upon the Company by an extension of time limits in this case. While it is true, from a technical standpoint, that the formal notice of arbitration was not served upon the employer until March 16, 2009, it does appear that the Company was given a clear written indication from the Union as early as December 4, 2008 that it fully intended to proceed to arbitration. Even accepting that there was a delay of better than two months with respect to the first ten grievances and approximately one month for the latter four grievances, this is not a circumstance where a Union seeks to revive a claim long abandoned to the possible surprise and prejudice of the other party.

 

 

            Dans l’affaire qui nous intéresse, comme dans celle dont l’arbitre Picher était saisi, le libellé du paragraphe 84.5 et de l’annexe 22 de la convention collective 4.16 stipule qu’une demande d’arbitrage doit être faite dans les 60 jours suivant la réponse de la Compagnie au stade 3. Le paragraphe 84.5 prévoit aussi qu’en l’absence d’une réponse de la Compagnie, le Syndicat a l’option de poursuivre à l’étape suivante et que s’il néglige de poursuivre, le dossier est considéré résolu et ne peut être porté en appel.

 

            Le retard occasionné par l’inobservation par le Syndicat des délais prescrits par la convention collective ne peut être mis sur le même pied que le retard dont témoignent les faits de l’affaire CROA&DR 3762, où l’arbitre avait été convaincu d’exercer sa compétence en prorogeant ces délais en vertu de l’article 60(1.1) du Code canadien du travail. Contrairement aux faits de l’affaire précitée, les circonstances des 25 griefs visés ici par l’objection préliminaire révèlent la tentative de la part du Syndicat de relancer des réclamations auxquelles il avait renoncé depuis longtemps. En supposant, sans l’affirmer, que le préjudice subi par la Compagnie serait négligeable compte tenu de la nature de ces griefs, il m’est impossible de conclure qu’il y a des motifs raisonnables de proroger le délai dans le cas qui nous intéresse.

 

            Pour tous ces motifs, j’accepte l’objection préliminaire de la Compagnie en ce qui touche les 25 griefs mentionnés expressément dans la demande d’audience des griefs relatifs à des violations de l’article 51 datée du 26 mai 2014. Bien que chaque incident relatif aux demandes de repos décrit dans les autres griefs figurant à l’annexe A sera entendu sur ses faits particuliers, le Syndicat n’est pas tenu de présenter un exposé pour chacun des griefs restants qui sera entendu sur le fond.   

 

 

Le 24 Novembre, 2015                                                                                               L’ARBITRE

 

                                                                                                                 ___________________

                                                                                                                   CHRISTINE SCHMIDT