BUREAU D’ARBITRAGE ET DE MÉDIATION
DES CHEMINS DE FER DU CANADA

CAUSE NO. 4496

 

Entendu à Montréal, le 11 octobre 2016

 

Concernant

 

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

 

Et

 

LE SYNDICAT DES MÉTALLOS – LOCAL 2004

 

LITIGE :

 

            Congédiement de M. Steve Lefebvre pour : « Avoir falsifié vos feuilles de temps, avoir réclamé et avoir été payé pour des dépenses auxquelles vous n’étiez pas éligibles, avoir falsifié vos fiches journalières de conducteur et avoir utilisé le camion de la compagnie a des fins personnelles sans autorisation pour les mois de janvier 2014 à août 2015 inclusivement ».

           

EXPOSÉ CONJOINT DU CAS :

            Les 1er et 5 février 2016, M. Lefebvre était rencontré dans le cadre d’une enquête officielle afin qu’il donne sa version sur des faits relativement a de présumées falsifications de ses feuilles de temps, présumées irrégularités sur comptes de dépenses, présumée falsification des fiches journalières du conducteur et présumée utilisation du camion de la compagnie à des fins personnelles sans autorisation du 1er janvier au 18 aout 2015. Suite à ces enquêtes, M. Lefebvre a été congédié.

            Le Syndicat prétend que le congédiement est abusif et mal motivé et réclamé la réintégration de M. Lefebvre à son poste permanent avec le remboursement pour toute perte de salaire, avantages et bénéfices.

            La compagnie est en désaccord et rejette le grief.

POUR LE SYNDICAT :                                 POUR LA COMPAGNIE :

Délégué                                                                  Directeur Relations de Travail

(SGN.) M. Lacroix                                               (SGN.) F. Daignault

Représentaient la Compagnie :

F. Daignault                                    – Directeur Relations de Travail, Montréal

S. Grou                                           – Directrice Pr. Relations de Travail, Montréal

A. Gagnon                                      – Superviseur, Matériel de Travail, Montréal

S. Roch                                          – Directrice Relations Travail, Montréal

 

Et représentaient le Syndicat :

L. Julien                                          – Représentant syndical, Montréal

M. Lacroix                                      – Délégué St. Laurent, Repentigny

J. F. Migneault                               – Vice-President, Montréal

S. Lefebvre                                    – Travailleur, St. Adelphe

 

 

SENTENCE ARBITRALE

Introduction

 

1.            Le 17 février 2016, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) a congédié M. Steve Lefebvre. Le CN a soulevé plusieurs motifs justifiant ce congédiement, incluant la falsification de ses feuilles de temps et des irrégularités sur son allocation de dépenses.

 

2.            Le Syndicat des Métallos Section locale 2004 (Métallos) n'a pas contesté les faits tels que relatés par le CN, mais a essayé d'expliquer pourquoi M. Lefebvre aurait agi ainsi.

 

3.            Pour les motifs qui suivent, et malgré les meilleurs efforts du représentant des Métallos, l’arbitre n’a pas été convaincu qu’il devait modifier la pénalité imposée par le CN. Le comportement de M. Lefebvre a continué pendant une longue période ; il ne s’agit donc pas d’un incident isolé.

 

 

Le contexte factuel

 

4.            M. Lefebvre travaillait pour le CN depuis 1993. Toutefois, à cause des travaux saisonniers, ses années de service en comptaient un peu moins de 16. M. Lefebvre était un préposé itinérant à l’entretien. Étant donné la nature de l’entreprise du CN, ce poste de mécanicien était autonome sous très peu de supervision. M. Lefebvre voyageait seul dans un camion du CN afin d’effectuer ses tâches.

 

5.            La preuve révèle que le CN a congédié l’ancien superviseur de M. Lefebvre apparemment pour cause. Ce superviseur était responsable d’une équipe d’environ 25 employés. Le CN a effectué une enquête des activités de M. Lefebvre pour la période entre le 1er janvier 2014 et le 28 août 2015.

 

6.            La preuve démontre qu’à maintes reprises M. Lefebvre a falsifié la documentation qu’il a soumise au CN. Grâce à la mise en place d’un système de GPS dès le 1er janvier 2014, le CN a comparé les réclamations salariales et financières de M. Lefebvre avec le lieu de son véhicule. Par exemple, le CN a démontré que M. Lefebvre a inclus les heures de conduite entre son domicile et son point d’attache. Toutefois, l’article 2.11 de la convention collective indique clairement que le temps rémunéré ne commence qu’au point d’attache.

 

7.            Le CN a également démontré que les heures réclamées par M. Lefebvre étaient nettement supérieures aux heures d’utilisation du camion. Les calculs du CN commençaient au moment du départ du camion de la résidence de M. Lefebvre le matin et se terminaient à son retour chez lui à la fin de la journée de travail.

 

8.            De plus, la preuve indique que M. Lefebvre aurait fait des réclamations pour des dépenses en vertu de l’article 22.1 de la convention collective. Pourtant, cet article ne s’applique qu’aux employés qui sont obligés de passer la nuit hors de leur lieu de résidence. M. Lefebvre a fait de nombreuses réclamations de ce genre, mais le GPS a démontré qu’il restait chez lui chaque soir.

 

9.            Les parties n’ont pas disputé le fait que M. Lefebvre, par le biais de divers agissements, s’est approprié près de 20 000 $ en salaire. L’arbitre a aussi tenu compte de la preuve à propos de la falsification par M. Lefebvre de ses fiches journalières. Ces fiches sont mandatées par le Code canadien de la sécurité.

 

La pénalité de congédiement

 

10.         Dans leur argumentation, les Métallos ont mis l’accent sur le nombre d’années de service de M. Lefebvre, ainsi que sur un dossier disciplinaire pratiquement sans faille. Ils soulèvent aussi une entente orale entre M. Lefebvre et son ancien superviseur. Tel qu’indiqué auparavant, le CN a prétendu avoir eu une cause juste et suffisante pour congédier cet ancien superviseur.

 

11.         L’arbitre n’est pas persuadé qu’une prétendue entente orale avec cet ancien superviseur pourrait excuser le comportement de M. Lefebvre. Il a sciemment falsifié ses feuilles de temps. Il a déposé des réclamations pour des dépenses en vertu de l’article 22.1 de la convention collective, même s’il restait chez lui. Ces événements ont été répétés à maintes reprises pendant une longue période.

 

12.         De plus, M. Lefebvre était le seul, parmi les 25 employés sujets à la supervision de l’ancien superviseur, qui a agi de cette façon.

 

13.         Les Métallos ont aussi fait valoir le fait que le comportement de M. Lefebvre a changé en août 2015 après une discussion avec son nouveau superviseur. Ce fait n’est pas contesté, mais les Métallos n’ont pas remis en question la position du CN que le nouveau superviseur n’était pas au courant de tous les faits, tels que déterminés par l’enquête subséquente.

 

14.         En somme, M. Lefebvre a brisé le lien de confiance avec le CN de façon définitive. Un employeur doit avoir confiance en l’intégrité des employés qui travaillent de façon indépendante et sans supervision : CROA&DR 2119. Il n’y a pas de circonstances atténuantes dans ce dossier qui auraient pu convaincre l’arbitre de modifier la pénalité imposée.

 

15.         Pour ces motifs, l’arbitre rejette le grief.

 

Le 4 novembre 2016                                                                        L’ARBITRE

 

 

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                                                                                                    GRAHAM J. CLARKE