BUREAU D’ARBITRAGE ET DE MÉDIATION
DES CHEMINS DE FER DU CANADA

CAUSE No 4517

 

Entendue à Montréal, le 13 décembre 2016

 

Concernant

 

LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA

 

Et

 

LE SYNDICAT DES MÉTALLOS – LOCAL 2004

 

LITIGE :

 

            Congédiement de M. Marc Fontaine : « Pour votre comportement indigne envers le contremaitre de la voie J. Lauriault, pour ne pas vous être conformé à la Politique du CN sur la prévention de la violence en milieu de travail et pour avoir quitter (sic) les lieux du travail sans autorisation avant la fin de votre quart de travail le 14 décembre 2015. »

EXPOSÉ CONJOINT DU CAS :

            Le 22 décembre 2015, M. Fontaine était rencontré dans le cadre d’une première enquête officielle afin qu’il donne sa version sur des faits relativement à un incident survenu le 14 décembre 2015 et (sic) le 11 février 2016, M. Fontaine était rencontré pour une enquête complémentaire relativement à une présumée altercation avec le contremaitre de la voie Jean Lauriault et son départ sans autorisation avant la fin de son quart de travail le 14 décembre 2015. Suite à ces enquêtes, M. Fontaine a été congédié.

            Le Syndicat prétend que le congédiement est abusif et mal motivé et réclame la réintégration de M. Fontaine à son poste permanent avec le remboursement pour toute perte de salaire, avantages et bénéfices.

            La Compagnie est en désaccord et rejette le grief.

POUR LE SYNDICAT :                                 POUR LA COMPAGNIE :

Délégué                                                            Directeur, Relations de travail

(SGN.) M. Lacroix                                         (SGN.) F. Daignault


Représentaient la Compagnie :

F. Daignault                          – Directeur, Relations de travail, Montréal

S. Lane                                 – Directeur principal, Ingénierie, Québec

S. Roch                                – Directrice, Relations de travail, Montréal

S. P. Paquette                      – Avocat, Montréal

 

Et représentaient le Syndicat :

L. Julien                                – Représentant syndical, Montréal

J. F. Migneault                      – Vice-président, Montréal

M. Lacroix                            – Délégué en chef - St. Laurent, Repentigny

C. Arguin                              – President, Unité, Québec

M. Fontaine                          – Travailleur, Laurier

 

 

SENTENCE ARBITRALE

Introduction

 

1.            Le CN a congédié M. Marc Fontaine pour son comportement « indigne » envers son contremaitre, M. Jean Lauriault, pour une violation de la Politique sur la violence en milieu de travail et pour avoir quitté les lieux sans autorisation. Ces événements ont eu lieu tout de suite après un incident déjà traité dans la décision CROA&DR 4516.

 

2.            Parmi les reproches formulés par le CN auprès de M. Fontaine, on retrouve de la violence physique.

 

3.            Les Métallos ont demandé à l’arbitre d’annuler le congédiement en raison de plusieurs facteurs atténuants.

 

4.            Pour les motifs suivants, l’arbitre a décidé de ne pas modifier la sanction imposée.

 

 

 

Faits

 

5.            Selon les incidents qui ont déjà été traités dans la décision CROA&DR 4516, l’équipe de travail composée du contremaitre, M. Lauriault, de M. Bergeron et du plaignant, M. Fontaine, se seraient réunies dans leur camion. Les trois employés sont tous des membres de l’unité de négociation des Métallos.

 

6.            L’arbitre a pris en considération les déclarations écrites de ces trois individus qui ont été préparées pendant l’enquête. Puisqu'il est aux prises avec des versions contradictoires, l'arbitre a dû trancher entre celles-ci. Par conséquent, il trouve plus crédibles les versions des faits relatés par Messieurs Lauriault et Bergeron.

 

7.            Ainsi, lors d'une discussion portant sur la façon dont M. Fontaine aurait conduit le camion (incident déjà traité dans CROA&DR 4516), ce dernier serait rapidement devenu en colère et aurait frappé le contremaitre Lauriault. M. Lauriault aurait réussi à éviter un coup au visage ; le coup aurait plutôt atteint son bras ou son épaule.

 

8.            M. Fontaine aurait par la suite brusquement appuyé sur l'accélérateur du camion. Après avoir immobilisé le camion, M. Fontaine a pourchassé le contremaitre Lauriault autour du camion. Il a ensuite pris le casque de sécurité de M. Lauriault et l’a lancé contre une bâtisse.

 

9.            Alors qu'il rassemblait ses affaires afin de quitter avant la fin de son quart de travail, M. Fontaine aurait dit à M. Lauriault « tu m’as fait perdre un an et demi ».

 

10.         Le 16 décembre 2015, M. Fontaine a répété à trois reprises à son superviseur « si je le poignais, je le tuais », en faisant référence au contremaitre Lauriault.

 

11.         Les Métallos ont soulevé certains conflits antérieurs entre M. Fontaine et M. Lauriault pour donner plus de contexte aux événements du 14 décembre 2015. De plus, M. Fontaine a déposé une plainte de harcèlement contre M. Lauriault en janvier 2014. Plusieurs représentants des Métallos ont fait savoir au CN que M. Fontaine et M. Lauriault ne devraient pas travailler ensemble.

 

12.         Les Métallos prétendent que le CN a refusé de faire quoi que ce soit.

 

13.         De son côté, le CN affirme qu’il a pris les mesures nécessaires. Par exemple, le CN a fait enquête sur la plainte de harcèlement déposé par M. Fontaine. À l'audience, les parties ont confirmé qu’une enquête a eu lieu et que M. Fontaine a par la suite retiré sa plainte.

 

14.         En ce qui concerne les conflits antérieurs, le CN a indiqué que, depuis longtemps, M. Fontaine éprouvait de l'amertume envers M. Lauriault. Par exemple, M. Lauriault a rapporté un épisode de somnolence de M. Fontaine en 2013 pendant que ce dernier était au volant d’un véhicule CN. M. Fontaine s'était vu imposer un retrait préventif de 5 mois.

 

15.         En juin 2014, un autre incident du même genre aurait eu lieu. M. Fontaine a par la suite été absent pendant un an. Il est important de noter qu’une situation médicale était à l’origine de ces événements.

Analyse et Décision

 

16.         Il est clair que les événements subséquents à ceux déjà traités dans le cadre de la décision CROA&DR 4516 méritaient une sanction disciplinaire. Les décisions antérieures du BACFC indiquent sans équivoque qu’une discipline sévère sera imposée pour tout acte ou menace de violence.

 

17.         Dans la décision CROA&DR 4070, l’arbitre Picher a noté que « (p)hysical aggression and the threat of physical aggression towards another employee is among the most serious forms of misconduct in any employment setting”. L’arbitre n’a pas trouvé que certaines autres décisions, comme la décision CROA&DR 4238, ainsi que d'autres références, telles qu'elles ont été présentées par le CN, étaient pertinentes à la présente affaire. Ces exemples se distinguent de la situation de M. Fontaine.

 

18.         Il arrive qu'un arbitre prenne en considération le facteur provocation dans l'analyse d'une situation violente : SHP 412. Selon la preuve au présent dossier, toutefois, l’arbitre ne trouve aucune provocation de la part de M. Lauriault, qui aurait aidé à trouver une explication pour les actes de M. Fontaine du 14 décembre.

 

19.         Les incidents en l’espèce impliquent, entre autres choses, un acte de violence physique de M. Fontaine, et l'intention qu'il avait d'en commettre d'autres, tel qu'il a été démontré par le fait qu'il pourchassait son contremaitre et l'aveu qu'il a fait après l'incident. Une sanction sévère est donc méritée.

 

20.         L’arbitre n’a pas été convaincu du fait qu’il doit modifier la pénalité imposée dans les circonstances. M. Fontaine ne semble pas avoir des remords, malgré la gravité de la situation. Il s’est excusé pour une situation potentiellement dangereuse du 12 décembre impliquant M. Lauriault, mais aucunement pour les événements du 14 décembre.

 

21.         Plutôt que d’admettre sa responsabilité, M. Fontaine semble prétendre que M. Lauriault était, d’une certaine façon, responsable des événements du 14 décembre. Les faits au dossier n’appuient pas cette thèse. Son manque de remords ne mène pas l’arbitre à conclure que des incidents semblables ne se reproduiraient pas dans le futur, si M. Fontaine était réintégré dans son poste.

 

22.         De plus, une analyse du dossier antérieur de M. Fontaine n'offre aucune justification qui amènerait l'arbitre à modifier la pénalité imposée.

 

23.         Pour ces motifs, l’arbitre rejette le grief.

 

 

Le 17 janvier 2017                                                                             L’ARBITRE

 

 

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                                                                                                    GRAHAM J. CLARKE