SHP 310

RELATIVEMENT à L'ARBITRAGE

 

ENTRE

 

LA FRATERNITÉ DES WAGONNIERS DES CHEMINS DE FER DU CANADA

(le "Syndicat")

-et-

VIA RAIL CANADA INC.

(la "Société")

GRIEF DE M.D. Séguin

 

 

L'ARBITRE : Me. Michel G. Picher

 

représentaient LE SYNDICAT :

F. Gadbois – Directeur général, Région du Saint-Laurent

T. Wood – Directeur général du système

 

représentaient LA SOCIÉTÉ :

A. Léger – Directeur - Relations de travail, Montréal

K. A. Pride – Directeur - Relations de travail, Montréal

 

Audition de l'arbitrage à Montréal, le 7 mai 1990.

 

SENTENCE ARBITRALE

Il s'agit de l'arbitrage d'un grief contre le congédiement de M. Daniel Séguin en date du 23 janvier 1989. Le motif du congédiement était l'accumulation d'un total de 80 mauvais points, suite à l'attribution de dix points pour un rendement de travail médiocre et de quinze points pour avoir fait des menaces de violence à sa superviseure.

L'exposé conjoint déposé devant l'Arbitre est comme suit:

POINT EN LITIGE :

Le 6 janvier 1989, M. D. Séguin, nettoyeur de voitures au Centre de maintenance de Montréal a assisté à deux enquêtes dont la première portait sur les prétendues menaces qu'il avait faites à un supérieur et la deuxième, sur la qualité médiocre de son travail à quatre reprises. Par conséquent, M. Séguin s'est vu attribuer 15 et 10 points de pénalisation respectivement, totalisant à 80 le nombre de points de pénalisation à son dossier disciplinaire.

FAITS :

Le 6 janvier 1989, M. Séguin a participé à deux enquêtes, la première portant sur des prétendues menaces faites à sa supérieure le 22 décembre. Il s'est vu attribuer 15 points de pénalisation pour cet incident. La deuxième enquête portait sur la médiocrité de son travail le 29 novembre, le 13 et le 22 décembre 1988 ainsi que le 3 janvier 1989. Il a ultérieurement écopé 10 points de pénalisation.

Lorsqu'on a ajouté ces points de pénalisation à son dossier disciplinaire, ceux-ci totalisaient 80 points.

M. Séguin a été congédié à nouveau le 23 janvier 1989 en raison d'une accumulation excessive de points de pénalisation.

La Fraternité est de l'opinion que les mesures disciplinaires attribués au dossier de Monsieur Séguin sont inéquitables et injustifiées. La Fraternité demande que les mesures disciplinaires soient retirées du dossier de M. Séguin et qu'il soit pleinement compensé pour toute perte salariale et monétaire alors qu'il était hors de service.

La Société a rejeté la demande.

La Fraternité et la Société s'entendent sur le fait qu'on ait respecté les stipulations de la convention collective no 3 et que ce litige ait été soumis à l'arbitre comme il se doit.

La preuve établit que M. Séguin, un employé de plus de vingt ans de service, avait un dossier disciplinaire chargé lors de son congédiement. Il comptait alors cinquante-cinq points de démérite. Cinquante de ces points avaient été infligés lors de sa réintégration au travail selon les termes d'un règlement à l'amiable suite à son congédiement de sa position à la gare Centrale de Montréal en 1987. Il était alors passible de mesures disciplinaires pour avoir quitté le lieu de travail sans autorisation, pour avoir consommé de l'alcool et pour avoir effectué un travail clandestin relativement à une entreprise privée qu'il exploitait. Les parties convenaient de réintégrer M. Séguin au travail en raison de ses années de service, en lui imposant une suspension de six mois, équivalant à sa perte de travail, et cela sous condition qu'il soit affecté comme nettoyeur de voitures à Pointe Saint-Charles.

En l'espèce, il y a deux accusations portées contre M. Séguin: la médiocrité de son travail et la prétendue menace faite à sa supérieure. Étant donné la conclusion de l'Arbitre quant au deuxième chef d'accusation, il n'est pas nécessaire de se pencher sur le premier.

La preuve établit que le 22 décembre 1988, M. Séguin travaillait sous la direction de Mlle. Maria Ferrante. Selon la preuve de la superviseure, lorsqu'elle a reproché a M. Séguin la qualité de son travail, celui-ci l'avait menacée. Le rapport qu'elle rendait le jour même à son propre superviseur se lit comme suit:

Le 22 décembre 1988, j'ai donné à Daniel Séguin - 241410, un travail de vacuum. à son retour, je n'étais pas satisfaite de son travail et je lui ai dit de le reprendre (dîner train #12). à ce moment là, M. Séguin m'a dit qu'une personne avait déjà essayé de lui faire perdre son emploi et qu'il n'a jamais été capable de la retracer. C'est alors qu'il m'a menacé que si j'écrivais des lettres contre lui et qu'il perdait son emploi, il me batterait (sic) car il s'est (sic) comment me retrouver.

M. Séguin nie avoir menacé sa superviseure. Il est convenu que M. Séguin avait déjà été le sujet de critiques de la part de Mlle. Ferrante, qu'il jugeait injustes et que lui, comme d'autres employés, la trouvait trop exigeante. Cependant, en ce qui concerne la menace, à la lumière de la preuve, l'Arbitre trouve plus convaincant le témoignage de Mlle. Ferrante, et ne peut accepter la preuve contraire de M. Séguin.

à l'avis de l'Arbitre, ni le fardeau du travail, ni le traitement général de M. Séguin par Mlle. Ferrante ne pouvait justifier la menace de violence implicite qu'il faisait à sa superviseure à l'occasion de l'échange verbal du 22 décembre 1988. La preuve de Mlle. Ferrante établit, en plus, qu'elle recevait depuis janvier 1990 des menaces anonymes au téléphone à deux ou trois reprises. La voix au téléphone lui disait que son bien-être allait dépendre de ce qu'elle allait faire le 7 mai. C'est seulement plus tard que Mlle. Ferrante apprenait qu'il s'agissait de la date prévue pour cet arbitrage, où elle serait le témoin principal contre M. Séguin. La Société demande à l'Arbitre de prendre cette preuve en considération pour appuyer sa prétention que M. Séguin à fait la menace du 22 décembre dont il est accusé.

Je ne peux accueillir cet argument. Il n'y a devant l'Arbitre aucune preuve apte à identifier l'auteur monstrueux des menaces anonymes adressées par téléphone à Mlle. Ferrante. Ces appels pourraient aussi bien être le travail d'un autre employé ou d'un superviseur qui cherche, de mauvaise foi, à miner la défense de M. Séguin devant l'Arbitre. Donc je ne peux y attacher aucune valeur probative.

Je suis toutefois convaincu, d'après la preuve de Mlle. Ferrante, que M. Séguin a menacé sa superviseure le 22 décembre 1988. Il va sans dire qu'une telle action mérite une mesure disciplinaire des plus sérieuses. Vu que M. Séguin avait déjà cinquante-cinq points de démérite à son dossier, je dois conclure que l'attribution de quinze points de démérite était justifié dans les circonstances. Étant donné que ses années de service lui avaient déjà mérité une deuxième chance lors de son premier congédiement à la gare Centrale, forcément, ce facteur a moins de valeur atténuante pour les fins de ce grief. En conséquence, l'Arbitre doit conclure que le congédiement de M. Séguin était justifié en raison de l'accumulation de plus de soixante points de démérite.

Pour ces motifs, le grief doit être rejeté.

FAIT à Toronto, ce 15ième jour de mai 1990.

(sgn) M. G. Picher

l'ARBITRE